Southern Africa (FR)

Décembre 2022
Février 2023

Congo RDC

Retour à Kinshasa après environ 10 ans.
La ville a changé , en partie.
Les grands axes , 30 juin et route de l'aéroport , sont désormais refaits , de nouveaux immeubles ont vu le jour.
Mais dès que l'on s'écarte un peu , ce sont toujours les mêmes rues défoncées , les ordures mal ramassées , les petites échoppes et marchands de rue.
Et ce sentiment d'une possible violence qui pourrait éclater ; alors le soir , le plus souvent , je marche accompagné d'un garde du corps.
Les enfants des rues , shégués , livrés à eux-même , estimés à plus de 20 000 pour une population d'environ 12 millions d'habitants , vivent les affres de la désolation : vol , violence , racket , prostitution , drogue , sans logement , nourriture , éducation et soins à l'avenant.
On les croise , souvent en bande , parfois courant , hurlant , poursuivants ou poursuivis.

Le pouvoir a changé de mains.
Kabila fils a fini , sous la contrainte , par laisser la place à FelixTshisekedi , allié d'hier.
Retiré dans ses fermes , enrichi.
Quelles sont leurs relations désormais ?
Autant d'interlocuteurs , autant de versions.
Mon sentiment est qu'il s'est émancipé de cette tutelle et que , certainement , il se représentera pour un second mandat en 2024 ; je vais en apprendre tellement plus en revenant à Kinshasa dans 2 mois...
Plus unanimes , les avis sur la nouvelle gouvernance : une volonté de réformer , d'assainir cet immense pays paquebot , 2.4 millions de km2 , 110 millions d'habitants , 3 ème après le Nigéria et l'Éthiopie , devançant de peu l'Égypte.
Mais ,
La tâche est titanesque , tellement d'habitudes de corruption à tous les niveaux , potentats nationaux et locaux.
Félix s'attache à mettre de l'ordre dans les questions minières , permis , conditions d'exploitation , transport , redevances. Là encore il doit batailler contre des intérêts parfois colossaux , pays , entreprises , individus , pas prêts à lâcher et prêts à tout ou beaucoup pour continuer de régner et s'enrichir dans ce pays qui dispose tellement de tout , "scandale géologique".
On y reviendra depuis Lubumbashi.
Il doit par ailleurs faire face aux ingérences du Rwanda et de l'Ouganda dans l'est , au Kivu.
Ils profitent de l'immensité du pays , des transports défectueux , quasiment pas de routes permettant de traverser le pays , pour piller les ressources minières.
Pour continuer de profiter , ils organisent le chaos et déstabilisent la région en soutenant les violences et exactions du M23 , mouvement tutsi.
La MONUSCO , plus importante force de l'ONU engagée sur un terrain extérieur 15 000 hommes , assiste impuissante , avant que la population de Goma et des environs ne se retourne contre ses fonctionnaires et soldats.

Je rencontre un groupe de belges , nés , élevés ici , activités dans le bâtiment.
"C'était mieux avant"...
Comprendre conditions financières et le partage des richesses.
Ils ont tous vécu des épisodes de violences , secousses des rues , départ précipité puis retour.
L'un d'eux me raconte l'époque de Mobutu , les villas de ses fidèles aux murs remplis de caches pour garder l'argent liquide et venir le rechercher en cas de problème.
Mobutu et son palais à la campagne , Gbadolite
Espace entre 2 Collines comblé pour rallonger la piste et permettre au Concorde d'atterrir.
Vaches venues de Suisse , air conditionné et musique classique
Tout était à l'avenant.
Kinshasa : bouillonnement , vibrations , énergie , qui donnent à la ville comme à Lagos ou Addis , quelque chose de New York.
Musique , création contemporaine , danse , c'est une pulsation intense et permanente
Je ne me lasse pas d'écouter Fally Ipupa.
Et partout , la bonne humeur , les sourires , la débrouille , la famille , les solidarités , malgré les difficultés , à cause d'elles également.

Le soir de la finale de la coupe du monde , nous assistons , une centaine de passagers , au match , en salle d'embarquement , avant 2 heures de vol , direction Sud Est pour Lubumbashi et le Katanga.Défaite française.

Congo RDC Zambie

Lubumbashi , capitale du Haut Katanga et 2 ème ville du Congo RDC est à 2 heures d'avion au sud est de Kinshasa.
Impossible de faire le trajet par la route , elles sont inexistantes ou coupées par endroit , idem pour le rail.
Le Katanga fut dans les années 60/70 une région en rébellion , refusant d'abord en 1960 de rejoindre la mère patrie après l'indépendance.
La situation sera provisoirement normalisée en 1963.
Entre temps , le dirigeant Patrice Lumumba , destitué , arrêté et assassiné en 1960.
En 1978 , opération franco belge à Kolwezi pour sauver les otages européens , mater les mutins et sauvegarder les intérêts miniers.
Le Haut Katanga est la province minière la plus riche du Congo ,
intérêts publics regroupés dans Gécamines
Présence de tout ce que le monde compte d'exploitants , investisseurs , intermédiaires , Canada , Chine , Australie , Suisse ... de toutes les tailles.
Tout en haut , Glencore , multinationale anglo suisse , 155 000 personnes , 200 milliards de CA , 4 milliards de résultats avoués.
Fondée dans les années 70 par Marc Rich , recherché par le FBI
Elle contrôle environ 50 % du marché mondial du cuivre , aluminium , zinc et plomb , pour ces métaux , on considère que c'est elle qui fixe les prix plus que les marchés
Et des positions très importantes dans : lithium , diamant , manganèse , pétrole , étain , charbon , terres agricoles
Je tâcherai de visiter qqes mines au retour dans la région de Kolwezi.

Lubumbashi est plus calme que Kinshasa , je vais au centre le matin déjeuner à la Brioche de café et croissants.
Il y a souvent dans les grandes villes africaines , je me souviens de Bangui , Lomé et Libreville , un lieu où , sans surprise , on se régale et on retrouve les mêmes habitués , en général des notables , avocats , professeurs , fonctionnaires qui aiment à refaire le monde.

Je fais qqes belles rencontres
Le directeur de l'Institut français récemment arrivé du Nigeria , que je reverrai à mon retour.
Un architecte qui installe un immense projet solaire de plus de 500 millions dans la région de Kolwezi
Les responsables locaux de Money Transfer , concurrent de Western Union
Des expatriés zimbabwéen et sud africain qui tiennent un bon restaurant près du golf , hâvre de tranquillité plus que centenaire à l'ouest de la ville.
Un fermier de la région de Kolwezi , Jakob ,venu enterrer son neveu mystérieusement assassiné qqes jours auparavant ; il est également aumônier et chanteur sur youtube
J'ai rendez vous avec la Ministre des Finances qui est occupée à l'assemblée locale , je la verrai au retour , ou pas.

Très peu de tourisme ici , je suis un des seuls muzungu ; l'accueil est facile et gentil et je me sens bien jusque dans les soirées , musique , danse , boissons

L'hôtel , un peu excentré , Faustin , me va très bien : propre , jardin , bar , teinturerie intégrée , sécurisé.
Il jouxte un supermarché où l'on trouve tout , beaucoup en provenance d'Afrique du Sud.
Je ne reste que qqes jours en attendant de repasser dans plusieurs semaines.
Je descends en Zambie.
Trajet en taxi puis bus
La route est correcte , des files de milliers de camions qui attendent de passer la frontière chargés vers le sud de minerais , cuivre et cobalt , principalement pour la Tanzanie , Afrique du Sud , Namibie.
Au retour , beaucoup de produits et équipements lourds pour les mines arrivés par les ports d'Afrique australe , destination la région de Kolwezi principalement.
La route comme seule voie de transport ; un ancien gouverneur , Moïse Katumbi , avec des intérêts dans des sociétés de transport routier , a participé au sabotage des anciens chemins de fer locaux , dit on.
J'en apprendrai tellement plus sur lui au retour.

Le soir après 12 heures de route , 400 kms , et un passage de frontière à 100 $ , j'arrive à Lusaka , capitale de la Zambie , sous la pluie tropicale et en nous extirpant d' embouteillages dantesques.
Je suis loin d'imaginer les difficultés pour traverser cette même frontière au retour

Bienvenue dans le monde anglo-saxon...

Zambie

Je loge à l'hôtel Fairview à Lusaka, la capitale.
Un peu vieillot mais le service est attentionné ; je vais découvrir tout au long du séjour la gentillesse de la population zambienne.
La ville est traversée par une avenue principale , Cairo Road.
D'un côté les quartiers pauvres , de l'autre le développement , cliniques , malls , zônes résidentielles , restaurants , le meilleur hôtel " Taj Pamodzi " bordé d'une longue avenue de palétuviers fleuris , mauve , et les administrations.
Le centre ville , donc , respire cette atmosphère British un peu vieillissante , enseignes , magasins , publicités , produits , que je suis sûr de retrouver bientôt dans le Zimbabwe voisin.

L'ex Rhodésie du Nord , indépendante depuis 1964 , a tout fait pour se détacher de l'attraction vers le sud du sous continent , Rhodésie et Afrique du Sud , où l'avait entraînée l'Angleterre ; elle s'est notamment rapprochée de la Tanzanie , sa voisine nord orientale.
Elle compte 18 millions d'habitants pour une surface équivalente à l'Espagne.
Elle vit , énormément , des mines , cuivre et cobalt , mais sans le désordre et l'absence de contrôle que connait , au nord , le Congo RDC; elle subit les aléas des variations des cours des métaux
La nouveauté et l'espoir , c'est le nouveau Président , Hakainde Hichilema , 'HH' , élu en 2021 contre Edgar Lungu , unanimement reconnu , lui , et respecté en Afrique et au delà.
Cinq fois candidat avant cette élection enfin gagnée , quinze fois arrêté auparavant
Tous ceux que je rencontre l'apprécient , gros engagement pour mettre fin à la corruption précédente et endémique
Il vient du monde rural et d'une famille modeste , il réussit dans les affaires.

Au Taj , je retrouve par hasard un couple indo jordano palestino zambien , elle rencontrée sur son stand dans un mall , comme il y en a beaucoup à Lusaka.
Leur histoire est fascinante , comment , , musulmane , elle a dû lutter plusieurs années pour faire admettre à sa famille son choix de vie avec son promis d'origine indienne , même après la conversion de celui ci
Au final ça s'est fait et ils roucoulent.
Il travaille désormais en partie avec son beau père.
Il me raconte son passage de l'autre côté du miroir , 2 minutes dans l'au delà , suite à une grave crise à l'hôpital , rencontre avec le créateur sans visage...

Le matin de Noël , peu de circulation en ville et je pars vers l'ouest , Mumbwa à 3 petites heures de route.
Objectif , l'un des parcs réputés , le Kafue , du nom du fleuve qui le traverse , né au Congo RDC avant de se jeter dans le Zambèze lui même filant vers les Chutes Victoria , puis dans l'océan Indien au Mozambique voisin.

Ça se révèle un peu compliqué.
D'abord , de novembre à avril c'est la saison des pluies.
L'essentiel de la quinzaine de lodges sont fermés.
Les animaux sont dispersés , et donc plus difficiles à voir , il y a de l'eau partout , plus de rassemblement autour des points d'eau.
Enfin , on ne peut plus traverser en voiture les immenses étendues du parc , le sol est imbibé et rend tout déplacement absolument impossible.
J'attends un moyen de transport au début de la route en terre vers le nord ouest , direction Kasempa , sous le manguier.
Nous sommes le 26 décembre , lendemain de Noël.
Ça palabre fort devant le camion chinois brinquebalant censé effectuer le trajet.
L'un des voyageurs plein d'espoir pour un hypothétique départ m'annonce qu'il retourne à son travail à l'Hippo Lodge , fermé pour la saison des pluies.
En fait de saison des pluies , ce sont de violentes averses , des orages violents mais épars , l'ensemble rendant les voies terrestres difficilement praticables
Bingo , on appelle le manager zambien sur place qui accepte de m'accueillir malgré la fermeture.
Son employé m'explique que le propriétaire , slovéne , est reparti pour les fêtes.
Je pourrai donc être un client incognito...
En attendant , il faut trouver un moyen de transport pour rallier le Lodge à 100 kilomètres de là , pistes de terre
Aucun véhicule ne passe et le camion demeure désespérément vide
Ça dure 8 heures
Nous décidons de nous retrouver le lendemain , tôt.

Zambia , Kafue Park

Le lendemain , mardi , je suis au rendez vous à 6.30.
Sous le manguier.
Personne.
Le camion a disparu.
Au fil des heures , les versions s'enchaînent ,
Le camion est parti la veille dans la nuit vers Kasempa
Le camion n'est pas parti car ,
Soit il n'avait pas de lumières
Soit le chauffeur s'est disputé avec sa femme
Mon contact du Lodge est aux alentours et va arriver
Il est parti avec le camion hier soir 

Après 3 heures de versions différentes et contradictoires , chacune délivrée avec conviction par son auteur , il est vraisemblable que le camion a quitté Mumbwa dans la nuit avec mon "ami" du Lodge.
Je décide de partir par mes propres moyens : une moto taxi avec son chauffeur qui parle très mal anglais et se fait expliquer plusieurs fois où se trouve le Lodge ; c'est pourtant simple , on doit tourner sur la gauche 15 kms avant le Lubungu Pontoon.
On attache sac et valise , il fait le plein , huile , pression et on attaque la route de terre , couleur latérite rouge clair , quelques passages avec d'immenses flaques d'eau , paysages ondoyants , très verts , hautes herbes , cultures , maïs et soja au début.
Bientôt la forêt , pas très haute ni très dense , les taons arrivent soudain par milliers , on couvre tout ce qui peut l'être , le k-way m'étouffe mais me protège.
Qqes frayeurs car mon chauffeur aime conduire assez rapidement ; je l'admoneste mais sa vraie nature de pilote le reprend dans les minutes qui suivent.

Surprenamment , après deux heures et demie de trajet , le Lodge est fléché sur la gauche , 15 kms.
En 3 heures nous y sommes.
Au bord du fleuve Kafue , majestueux , rempli à ras bord des pluies de la saison environ 250 m de large
Lodge de luxe
Désert de clients
Je retrouve mon ami qui a mis , lui , 7 heures avec le camion et s'embrouille dans des excuses incompréhensibles.
Surtout je file sur l'immense terrasse en bois qui domine l'eau où nagent , surnagent ,10 hippopotames qui résident depuis toujours , ou presque , dans cette zône précise : une bénédiction qui autorise le nom du Lodge.
Je passe un deal honorable avec le manager local pour rester deux jours dans ce petit paradis.
Au programme ,
Deux heures sur le Kafue en bateau à moteur
Visite de la mine de cuivre , proche , exploitée de 1911 à 1971
Chalet somptueux au bord du fleuve , "Out of Africa" sans Meryl
À force de voyager roots ou backpackers , j'avais un peu oublié le service que l'on peut avoir dans certains lieux

L'observation des hippopotames est fascinante
Ils passent la journée à sortir la tête de l'eau toutes les 30 secondes , secouent leurs petites oreilles arrondies , rentrent de nouveau dans l 'eau , 1 mètre 50 pour pouvoir se tenir et se nourrir au fond.
Parfois ils poussent un grognement dont la puissance laisse imaginer la taille de leur corps immergé et ce qui pourrait arriver à les côtoyer de trop près.
De tels groupes vivent tout au long du Kafue ; il arrive que l'un d'eux vienne s'immiscer chez les voisins : c'est alors une bataille violente qui peut se termine par la mort.
La nuit , ils sortent sur la berge pour se nourrir d'herbacées.
Leur peau craint le soleil et je ne me lasse pas de les suivre , teinte marron et rosée , monstres sages veillant sur leurs petits.
La saison humide s'étend de novembre à mars.
Terrains impraticables dits de "cotton" en Toyota pour aller observer les grands fauves près des points d'eau.
Donc la quinzaine de lodges du parc ou presque ferment à cette saison.
Tous les cinq zambiens qui demeurent et entretiennent sont adorables , habitués à délivrer un service haut de gamme à une majorité de Suisses aisés , pléonasme , qui arrivent souvent en petit avion de Lusaka sur la grande piste herbeuse proche du Lodge.

Pour une raison indicible mais pas inavouable , je passe la seconde journée dans la résidence des employés , un peu à l'écart des chalets principaux.
Ils ont équipé au mieux une chambre plus rudimentaire mais qui me va bien.
Feu , cuisine , télévision branchée sur les sitcoms nigérians , balade seul , sans armes et un peu osée , dans le bush environnant.
Re observation des hippopotames.
Toujours et toujours
Je resterais des jours au bord du fleuve , puissant et silencieux le jour , la nuit , quand tout et tous se réveillent.
Baignade absolument déconseillée , présence de crocodiles.

Écriture
Photos
Lecture
Une découverte ,
Arcadie... Arcadie...
Giono sur sa Provence et les olives
Extraits , morceaux choisis :

Surveiller le ciel , quelle ressource de passion.

Dans certains villages de la partie noire des Basses-Alpes , il n'y a pas d'autres intempéries que la solitude.

À la Sainte Catherine , c'est à dire le 25 novembre , on dit que l'huile est dans l'olive. 

Dès qu'on s'éloigne vers les solitudes , que le climat se fait plus âpre , on cueille l'olive une à une sur l'arbre même à la main.
Cela va loin.
C'est une autre civilisation.

J'ai un verger mal entretenu dont les frontières sont indécises.

Le notaire m'avait donné des numéros de cadastre mais , en pleine colline , c'est un violon à un manchot.

Voilà le pays radieux qu'on domine.
Il est également huilé de soleil léger et glacé.

Pas petitement exquise , mais exquise avec violence et excès.

Le long des chemins , les raies de vignes s'ouvrent comme les tranches d'un éventail , découvrant cette terre d'ocre blonde sur laquelle les ceps ont pleuré et de laquelle monte la sève chaude et gaillarde.

Giono donc , me ramène , à travers la Provence , à la correspondance de Camus et Char dévorée qqes mois auparavant.

Zambie

To Mongu
From Mongu
To Mongu

La route de Mumbwa à Mongu est rectiligne , près de 500 kms pour rejoindre l'extrémité occidentale de la Zambie , près de la frontière angolaise.

Mongu est paisible

La large avenue qui la traverse est bordée de magasins et d'échoppes , "general dealer" , atmosphère étouffante avec le moteur des armoires réfrigérées pour les boissons.
Depuis les premiers jours en Zambie je suis , à l'exception de Lusaka , le seul muzungu , blanc.
On m'appelle boss ou brother
Le sourire est très fréquent
Les photos faciles , je ne me prive pas
Au sud de la ville , ShopRite : c'est une chaîne sud africaine au milieu d'un petit mall , parfaitement tenu.
Le 31 décembre , dans un local spécifique du supermarché , grande file d'attente pour acheter des pommes de terre par sac : va comprendre !
Personne ne peut m'expliquer cette folie de fin d'année.
Au Country Lodge , la chambre est spacieuse , la wifi parfaite , et comme toujours le service impeccable.
Sur le parking de ShopRite , je croise Julius , au volant de son Defender : élégant avec son chapeau , il est accompagné d'une demi douzaine d'enfants adorables.
Il m'en avoue 15.
Il est fermier au sud de Mongu et me propose d'aller le visiter.

Le 31 décembre , je participe toute la soirée à une cérémonie à l'église pentecôtiste.
Sous une immense toile de tente , en attendant la construction du bâtiment , la centaine de fidèles danse , chante , prie.
Ferveur et crédulité face à des incantations qui promettent une prochaine année meilleure , débarrassée de tous les problèmes de 2022...
"Doors open" c'est la mantra pour 2023 , répétée à l'infini.
Je me lasse.

Kalabo est à une heure de Mongu , nord ouest , on enjambe le Zambèze , timide ici , et son petit frère voisin le Little Zambezi.
L'horizon est totalement dégagé.
Parfaitement plat.
Linéarité absolue.
L'immensité sans limite aucune
Plaine herbeuse et qqes arbres , acacias souvent d'assez petite taille.
Envie de survoler à l'infini. 

La frontière angolaise est à 50 kms , plein ouest , route parfaite.
Diamonds for sale , provenance lusophone : ce pays me tente , beaucoup et ça va se confirmer.

Kalabo est l'entrée du Parc Liuwa Plain.
Ce parc a une des plus fortes réputations de Zambie et d'Afrique.
Il a été repris en gestion par African Parks.
C'est une ONG , néerlandaise et sud-africaine créée en 2000 pour gérer et développer sur le long terme des parcs en Afrique , 22 à ce jour , 12 pays , 20 millions d'hectares.
Les accords de partenariat sont signés avec les gouvernements et autorités locales.
Congos , Zambie , Zimbabwe , Rwanda ,  Mozambique ,  Tchad ,  Bénin ,  Soudan du Sud  , Angola , Malawi 
Plus de 1000 gardes en tout , ceux que je croise ici sont bien équipés.
Le Prince Harry est le Président d'honneur.

Pour entrer , il faut emprunter le bac qui croise sur la petite rivière.
J'attends un véhicule qui m'emmènera au quartier général du parc à une heure de piste.
J'attends
Longtemps
Rien 
Je lis , photographie , échange
Toujours rien
Après 24 heures je rebrousse chemin 
Ce n'est pas mon temps
Je reviendrai
À la saison sèche
Avec un véhicule 
Et si possible un avion.
Out of Africa 

Je rejoins Mongu sous la pluie.
Soirée au Baker , musique , danse et bières.

Zambie Namibie

À Mongu , je retrouve Edgar qui m'a promis de visiter son domaine avec lui.
Edgar , c'est une force de la nature , géant , entrepreneur agricole venu des télécoms zambiennes.
Tout le monde le connaît ici , au volant de son Defender bleu clair retapé.
15 enfants donc et 26 frères et sœurs.
Nous partons avec 3 de ses enfants sur la plateforme arrière , l'école ne reprend que la semaine suivante.
On quitte la grande route du Sud , on oblique à droite , petits villages de quelques cases , au milieu des cultures potagères et des manguiers.
Nous nous arrêtons chez sa maman , 95 ans , il lui apporte du pain tous les jours.
Elle n'entend plus tout , reste alerte dans sa petite maison au toit de tôle.
Famille , voisins , amis , la frontière est floue , la solidarité totale.
La progression ralentit quand nous repartons , bientôt la plaine , Balows Plain , à perte de vue , la terre est riche , beaucoup d'eau mais nous passons , au ralenti.
Jusqu'à ce que nous ne passions plus.
On s'arrête là où une carriole de 2 boeufs prend le relais pour nous emmener à 20 minutes de là.
Encore plus au milieu de la plaine , minuscule monticule où ils ont construit une petite cabane pour se réfugier en temps de pluie et se protéger du soleil.
C'est le refuge de qqes ouvriers agricoles et de ses gardiens de ses troupeaux.
Il cultive le riz , fameux dans la région , les tomates , choux , maïs.
280 vaches pour la viande qui rentrent le soir dans les enclos , mobiles pour fertiliser alternativement les parcelles.
Il en espère 500 à la fin de l'année.
Il possède 10 hectares " rachetés " au roi local , propriétaire de la plaine jusqu'au Zambèze.
Je demande à rencontrer le roi : c'est 100 euros pour un entretien.
Réduction pour les muzungus ?
Pas le temps de négocier , je pars demain.
Le temps s'étire
Au milieu de ce paysage à l'infini , horizon sans limite , silence , nuages qui font perdre l'échelle , soleil.
On est bien , juste bien
Pas mieux à ces instants.
Sur le feu , la chima , sorte de polenta blanche à la farine de maïs , tomates et champignons ramassés ici ; j'ai apporté et prépare sur la braise du lard et un filet de bœuf , poivre et piment : anthologiques.
Au vin près.
Somptueux.
Avant de repartir sur notre char , visite à un des troupeaux , 80 bêtes bien nourries à l'herbe de la plaine.
En repartant , il tient à me montrer une grande porcherie , construite récemment.
C'est propre , il projette de monter une usine à saucisses : Chicago dans la plaine zambienne.
Pour le remercier , je lui promets de lui faire parvenir une paire de jumelles pour observer toute l'étendue de son territoire et ses bêtes qui paissent.

En quittant Mongu , j'offre à M. une bible.
Elle pleure.

Les mangues
Décembre , Janvier , c'est la pleine saison.
Les manguiers , ici comme dans tant de pays d'Afrique , sont des arbres repères des villes et villages , immenses , arrondis , prodigueurs d'ombre , et lieux de rassemblement et palabres.
Partout des petits stands où , souvent des enfants , vendent les fruits.
Au Lodge , ils tombent lourds et mûrs.
J'en ramasse , les épluche , dégage le gros noyau et me régale plusieurs fois par jour ; 5 fruits , c'est bien ça la recommandation ? Je suis au delà.
Peau tendre qui balance entre le vert et jaune tendres en passant par l'orange , la chair comme jamais chez nous.
Couleur orange mangue
Parfum mangue
Jus goût mangue
Une orgie 
Mangue , Mango.

Le Zambèze

Il structure toute la région et au delà , le Kafue est un affluent
4 ème fleuve d'Afrique après le Nil , le Congo et le Niger.
2750 kms.
Sa source en Zambie , l'embouchure dans l'Océan Indien au Mozambique.
Non sans avoir chuté à Livingstone , Victoria , plus grande cataracte au monde , 1700 mètres de large , 110 de haut.
À la frontière de la Zambie et du Zimbabwe.
Bientôt.

Sur la route qui descend de Mongu vers le sud , Zimbabwe et Namibie , on longe le fleuve , d'abord sur notre droite , à mi chemin on l'enjambe , il passe à gauche , grossit , s'élargit , quelques rapides , mais rien en regard de ce qui l'attend à  Victoria , à quelques kilomètres de là.

La frontière avec la Namibie est étonnamment calme et facile à passer.

Katima , à l'extrémité absolue , point le plus à l'est , fin du couloir de Caprivi, 450 kms en longueur et 30 en largeur , coincé entre l'Angola au nord et le Botswana au sud.
Créé en 1890 du nom du chancelier allemand qui succéda à Bismarck pour permettre un accès à l'Océan Indien , à l'Est
Finalement pas si utilisé à cette fin.
Construction du port de Walvis Bay en Namibie. Désenclavement de la Rhodésie puis Zimbabwe par l'Afrique du Sud et Durban.
Dégagement congolais et export par Dar El Salam en Tanzanie ou Afrique du Sud via Zambie et Zimbabwe.

Je n'étais pas venu en Namibie depuis 1995 , vraisemblablement jour pour jour.
Première de nos campagnes hivernales estivales en Afrique du Sud.

Katima ,ville moyenne , une grande rue principale avec des surfaces commerciales sud africaines , malls , supermarchés.
Au restaurant Passione , en étage , terrasse , pizzas excellentes et petit déjeuner.
On sent le poids économique de l'immense et puissant voisin du sud.
Tous les produits finis et une grande partie de l'alimentation  en proviennent.
L'Afrique du Sud est devenue un lieu d'émigration , pour tous ceux , du nord , Zimbabwe et bien au delà , vers un pays aux prises avec ses propres problèmes et démons , tensions , manque d'électricité et même d'eau maintenant. Mais nombreux y vont , travailler , apprendre , enseigner , se faire soigner et dans le sens inverse , beaucoup de sud africains dans les mines , postes d'encadrement.

Les namibiens
Les zambiens
Les congolais 
Tous rencontrés depuis bientôt un mois sont formidablement accueillants , chaleureux , bienveillants.
Bien sûr un peu plus tendu parfois à Kinshasa , mais l'énergie dégagée y est tellement forte que , parfois , ça dépasse du couvercle sur la casserole bouillonnante.

Namibie

C'est assez agréable de passer qqes jours à Katima.
Le Sweet Guest House est central , un peu en retrait de la rue principale , elle même bordée d'innombrables surfaces commerciales , beaucoup de vêtements et chaussures.
ShopRite et Pick and Pay comme Carrefour ou Auchan
Repas au Caprivi Adventures , très bon petit déjeuner style British ou à l'étage au Passione , pizzas très honnêtes avec un vin blanc sud africain , enfin ça commençait à manquer.
Le soir , Infinity , dancing et bar géant en plein centre
Billards , cocktails , musique ...
Tout pour plaire et se plaire.
J'ai décidé de visiter Etosha , nord du pays , véhicules uniquement louables à Windhoek la capitale de ce pays de 850 000 km2 et 3 millions d'habitants.
Bus de Katima à Windhoek donc , 16 heures de trajet , plutôt confort , arrivée à l'aube.
Le loueur , tous les loueurs sont à côté du terminal.
C'est dimanche et à 7 heures pile on m'ouvre , je repars en 30 minutes avec mon 4 X 4 Suzuki.
Direction plein nord , 6/700 kms de route , toutes droites et parfaites entre les immenses propriétés grillagées transformées en Lodges de luxe , animaux et éventuellement chasse.
Pause à Otjiwarongo , presque toutes les villes commencent avec un O .
À qqes kms , grande usine de ciment , sigles chinois à l'entrée.
Bientôt en face , Otjikoto : de très très longues et hautes digues ceignent l'immense site ; on ne voit rien de la plus grande mine d'or namibienne exploitée depuis 2014 par le spécialiste canadien B2Gold.
200 000 onces d'or par an , leur deuxième mine après le Mali , 600 000 et avant le Nicaragua.
1 000 000 oz en tout chaque année.
Chiffre d'affaires : 1.8 Mds Cnd $
Cash flow annuel : 625 M Cnd $
Ça va pour eux.
Curieuse sensation que cette appropriation des ressources minières , agricoles en cours , partiellement , par des intérêts étrangers qui font dans ces sites largement ce qu'ils veulent
Déclarent ce qu'ils veulent
Gagnent beaucoup
Énormément
Voir Glencore , De Beers...

Etosha , comme un grand rectangle de 400 kms en longueur sur une centaine en hauteur.
Le centre et le nord sont occupés par un grand marais asséché.
Qqes lodges aux extrémités et au centre , 5 en tout.
C'est confortable , abordable , au cœur du parc et on mange assez bien , accueil
toujours souriant.
Je m'installe , dîner rapide car sortie avant le crépuscule.
À qqes kms du camp , 2 jeunes lions mâles en bord de piste se reposent , chaleur et journée inactive.
Crinières naissantes , et même s'ils n'ont pas encore totalement atteint la taille adulte , ils dégagent une puissance redoutable.
On poursuit dans la nuit noire , désormais , on les suit avec le projecteur rouge , un lion plus âgé , des rhinocéros blancs , une hyène , des girafes , des zèbres et des antilopes .
Silence absolu
Ils sont tous là
Proches
La nuit garde le mystère de leur cohabitation parfois tragique.
Départ à l'aube , lumières et températures encore douces.
Le parc est bien conçu , avec son axe est ouest principal , et de nombreux chemins latéraux.
J'en emprunte plusieurs , toujours seul pour rencontrer orynx , impalas , zèbres , girafes.
À un embranchement , 6 rhinocéros adultes et un bébé.
Mon arrivée les dérange , je vais les suivre longtemps , eux courant à proximité de mon chemin.
Ils entourent le petit et deux mâles me signifient , en tournant vivement sur eux mêmes , que je ne suis pas le bienvenu.
À un moment , nous sommes plus proches , au point de me préparer à passer en marche arrière.
Mais ils sont rapides et lourds...
Finalement ils changent de côté traversent le chemin et s'éloignent définitivement , cernant toujours le petit
Qui doit bien peser 200 kgs.

Je file vers la sortie ouest , immenses termitières grises ou ocres , selon la terre , girafes courant l'amble ou s'abreuvant , position majestueuse et élégante pour descendre la tête au ras de l'eau , animal le plus haut de la création , silence magique.

Je suis impressionné du nombre d'animaux , pas tous , évoluants seuls.
Peut être momentanément.
Ou non.
On ne sait rien ou si peu
Spectateurs fugaces de leurs vies mystérieuses.
Les mêmes depuis si longtemps
Pour longtemps encore
Si l'on continue à les respecter et les protéger

Parc peu fréquenté
Bien géré et entretenu
Magnifique

En fin de journée , je rejoins Opuwo , extrémité nord ouest de la Namibie , juste sous la frontière avec l'Angola.
C'est la région du Kaokoland , une de celles , avec d'autres moins peuplées du Botswana et de l'Angola , où vivent les Himbas et Hereros.
Les premiers signes de ces peuples éleveurs et cueilleurs nomades remontent au 15 ème siècle , au Botswana voisin.
Ils sont d'origine bantoue.
Les missionnaires apprirent la couture à certaines femmes , façon de les soustraire aux envies concupiscentes de leurs maris , femmes passées donc ainsi de la nudité presque totale à une tenue moins tentante
Ce groupe adopta un mode de vie plus urbain et se sépara devenant les Hereros.
On croise donc ,
Les Himbas , femmes dévêtues en haut , colliers sophistiqués , peau recouverte de terre ocre , colliers de couleur , souvent pieds nus.
Les Hereros , robes amples et patchwork , chapeau dont la largeur dit la richesse.
Les deux quotidiennement ainsi habillés , comme pour une cérémonie.
Dans les villages environnants mais aussi dans Opuwo , environ 5 000 habitants , au supermarché , dans tous les lieux publics , ainsi vêtues.
Tous et toutes cohabitent , y compris avec d'autres namibiens n'appartenant pas à ces deux tribus.
Au début du siècle ils furent , en très grand nombre , massacrés par les allemands , maîtres alors de la région , premier génocide , reconnu en 2021.
Von Trotha , génocidaire.

Je quitte Opuwo et file sur la route en terre , traversant les montagnes , vers l'ouest , l'océan est au bout , mais décidément trop loin.
Je m'arrête dans un minuscule village , une dizaine de cases , région aride.
Sous un toit qui nous offre un peu d'ombre , je leur apporte du sucre , de l'huile , des soupes en sachet , de la farine pour faire l'équivalent du porridge et des bonbons.
Je leur achète des colliers et bracelets.
J'échange avec l'un d'eux , quelques mots d'anglais.
Les autres s'expriment en onomatopées.
Elles se coiffent l'une l'autre , confectionnent les ornements , leurs parures du haut du corps , métal , coquillage , sont élégantes et sophistiquées.
Nulle gêne à paraître le haut du corps dévêtu.
Leur peau est parfaitement lisse , de la couleur des minuscules tas de terre en vente sur les marchés , ocre , uniformément et magnifiquement ocre.
Les filles d'une dizaine d'années portent les jeunes enfants , s'occupent d'eux et les consolent comme de jeunes mamans.
Je suis assis au milieu de ce petit groupe d'une quinzaine de personnes.
Nous savons si peu de la vie de chacun.
Ils échangent et rient
Je photographie
Je repars après une heure parmi eux , moment unique et inoubliable.

Le lendemain je longe le sud de la frontière angolaise , Okahao et Oshakati , avant d'obliquer plein sud pour revenir à Windhoek rendre la voiture.
Crépuscule de feu.
Immenses lignes droites désertes.
Horizon plat à l'infini.
C'est beau , unique , magique.
Les mots ? Quels mots ?

Botswana Zimbabwe

Je fais le trajet en sens inverse depuis Windhoek pour regagner Katima en bus de nuit.
Stupidement , j'avais demandé un visa namibien trop court de qqes jours et je dois passer à l'administration du Home Office pour le faire prolonger et me faire rançonner , légèrement.

La géographie et les frontières de la région sont étranges en partie à cause de la bande de Caprivi.
Je quitte donc la Namibie à Ngoma pour entrer au Botswana , séjour rapide à Kasane , Chobe Park , crocodiles , éléphants et hippopotames cohabitent dans la plaine humide et verte ; les éléphanteaux se roulent dans la bonne boue , la mère jamais loin.
On est là au point de rencontre de 4 pays : Namibie , Botswana , Zambie , Zimbabwe ; mieux que nos 3 frontières européennes.

Le Zimbabwe donc pour un séjour intense , de longs trajets en commençant par Victoria Falls.
Les chutes Victoria , grandiose et plus large cataracte au monde , 1 700 mètres.
Un chemin , au milieu des arbres et des hautes herbes , longe les chutes.
Le Zambèze se déchaîne en se précipitant une certaine de mètres plus bas , nuages de gouttes d'eau , arcs-en-ciel permanents , grondements remontant du fond que l'on arrive à deviner malgré l'étroitesse et la profondeur des gorges.
Peu de monde , très peu même , en regard de ces paysages uniques.
Le COVID n'est pas complétement effacé ici.
Un couple d'expatriés rencontré au Botswana m'envoie copie d'un message Facebook qui prévient les membres de leur groupe de la présence de lions dans leur quartier ; ils renoncent à leur jogging matinal.

Longue traversée en bus en longeant l'immense Parc Hwange , destination Bulawayo , deuxième ville du Zimbabwe.
On s'arrête fréquemment , voyageurs postés le long de la route à nids de poule et transports de paquets pour pallier l'inefficacité quasi absolue de la poste nationale.
Un paquet , un billet au départ
Un billet , un paquet à l'arrivée

Zimbabwe

Bulawayo c'est la partie des Ndebele emmenés par leur chef Joseph N'Komo dont la statue orne un carrefour du centre ville.
Histoire tragique
1980 Accords de Lancaster
La Rhodésie devient indépendante
Tout change , elle devient le Zimbabwe , Salisbury la capitale est désormais Harare
Mugabe d'abord Premier Ministre devient Président en 1987 de ce pays de 400 000
km2 et 16 millions d'habitants.
C'est un état richissime , le grenier à blé de l'Afrique Australe avec de nombreuses mines au centre, notamment la Copper Belt
Au fil des années , Mugabe va se radicaliser , entraîner avec lui la nation au banc des accusées , corruption , élections faussées , appauvrissement.
Beaucoup partent , Afrique du Sud et pays anglo Saxons.
Il s'accroche et doit quitter le pouvoir en 2017 ayant échoué à voir sa femme à sa place , remplacé par son second , Mnangagwa dit " le crocodile " , du temps qu'il massacrait les fermiers blancs en 1964/65 avant de faire sauter un train et de passer 10 ans en prison.
Entre 1982 et 1987 , il participe , et certains estiment qu'il dirige , le Gukurahundi , génocide de 20 000 Ndebele dans le Matabele.
Il y aura de nouvelles élections en 2023 , il sera certainement réélu.
Avec lui le pays sombre , doucement mais sûrement

Le Parc Matobo , juste au sud de Bulawayo abrite la tombe de Cécile Rhodes qui estimait que c'était là le plus beau lieu d'Afrique Australe.
Il ne s'est pas trompé , vue à 360 degrés à l' infini, rochers en équilibre précaire , orages au loin , tons ocres et verts , silence.
Je croise 2 gardes armés qui suivent un couple de rhinocéros , elle en gestation , 16 mois.
On s'approche à quelques mètres
Les géants de près de 1 500 kilogs sont aussi impressionnants que leurs congénères les hippopotames.
Calmes finalement , en pleine dégustation végétarienne , la corne coupée tous les deux ans pour décourager les braconniers zambiens qui s'introduisent dans le parc.

Je file tout au sud en voiture , à la frontière sud africaine , Beitbridge.
Beaucoup de monde , mais assez calme pour aller travailler chez le puissant voisin ou faire des courses , c'est moins cher , à Messina , la grande ville de l'autre côté du fleuve Limpopo.
Il y a comme ça des noms mythiques , des lieux que j'avais envie de voir , seulement pour leur consonance.
Il s'en va se jeter , comme son cousin Zambezi au nord , dans l'Océan Indien au Mozambique , lui à Xai Xai.

À partir de Beitbridge , je vais remonter vers le nord , région des Eastern Highlands , le long de la frontière avec le Mozambique.

Première étape Chiredzi , très chaud.
Ici on irrigue et produit la canne à sucre , champs et usine propriété de l'Anglo American qui a tout revendu , sous la pression , à l'époque de Mugabe.
Il y a de fréquents barrages de police , toujours bon enfant , on ne me demande jamais de contre partie.
Cette région est dans l'axe des cyclones qui dévastent régulièrement le Mozambique , venus traversant le sud de l'Océan Indien , commençant par Madagascar avant d'entrer ici au sud est du Zimbabwe.
Dans le parc voisin du Gonarezhou , le pont principal a été détruit en 1998 et pas reconstruit depuis.
Le Parc est connu pour ses falaises que je ne peux rejoindre , c'est la saison des pluies et les routes sont impraticables.
Il est bordé par une immense réserve d'animaux appartenant à la famille Jones , Dow Jones ; ils ont reçu Obama , Trump non accompagné.
Les photos de ces falaises sont stupéfiantes ; je reviendrai depuis la Namibie et le Botswana à la saison sèche , septembre octobre , 2024 , inch'Allah.

En route , quelques heures , pour Chipinge.
Le Zimbabwe et le Mozambique sont ici séparés par des sommets arrondis et couverts de forêts , beaucoup d'épineux , un peu d'eucalyptus.
Habitats dispersés , huttes rondes , carrées , toit de chaume.
Partout je suis accueilli avec sourire et gentillesse , jamais de problème avec les photos ; je fais monter dans la voiture celles et ceux qui demandent pour un trajet souvent courts , ils proposent toujours un peu d"argent , c'est non.

Zimbabwe

Avant d'arriver à Chipinge , des groupes de femmes , au bord de la route , vendent des fruits , bananes , ananas.
Des milliers d'ananas mis en carton pour le nord , Harare , et le sud , Johannesburg.
On m'explique que ce sont des Victoria , petite taille , chair tendre et sucrée.
Je rencontre Bart.
Il gère une immense propriété agricole pour le compte d'investisseurs :
300 hectares de noix de macadamia
200 hectares de bananes
Un peu d'avocats
La propriété , le long des flancs de montagnes et jusqu'au fond de l'immense et large vallée est somptueuse, on se croirait dans la region de Stellenbosch.
Au moment des lois agricoles , début des années 2 000 , le gouvernement a repris les 3/4 de l'exploitation pour les redistribuer aux populations locales.
Récemment , chauffés à blanc par des politiciens locaux un peu avant les élections , un groupe d'hommes est venu revendiquer l'ensemble de la propriété restante , ils ont perdu en justice.
Les parents de Bart sont arrivés , comme beaucoup de blancs , d'Afrique du Sud au début du 20 ème siècle.
Ils se sont installés au sud de la Rhodésie.
Bart manage 500 employés.
Fascinante culture des noix de macadamia
Originaires d'Australie
Arbustes de quelques mètres
Il en produit 500 à 1 000 tonnes par an , les sèche dans d'immenses cuves de bois ressemblant à des tonneaux verticaux.
Débarrassées de leur première coque , elles sont mises en sacs de 25 kgs et conservées au frais dans de grands entrepôts tout neufs.
Sauf que ,
Les premiers clients sont les chinois ; COVID obligé , le prix a chuté de 6 à 2 $ le kilo et la demande est très faible.
Il a donc toute la récolte 2022 sur les bras , entreposée , attendant que le premier lâche , acheteurs ou vendeur.
Compte tenu de la latitude , les noix de la région ont une qualité particulière , le goût et la texture très subtils.
Il emploie 80 personnes pour sécuriser et empêcher le vol : un intermédiaire chinois sévit en ville , rachetant tout ce qui lui est apporté , rapines de nuit dans les immenses vergers.

La question agricole est fondamentale ici au Zimbabwe.
Mugabe a décidé d'exproprier les fermiers blancs , présents parfois depuis plusieurs générations.
Ils sont partis , pas , peu , ou mal indemnisés en Zambie , Botswana , Namibie , Afrique du Sud , voire au nord , Congo RDC.
Certains sont restés , ont gardé ou récupéré une partie de leurs exploitations.
Aujourd'hui la situation est peu claire et incertaine.
Ce qui est sûr c'est qu'une partie des terres redistribuées sont aujourd'hui en jachère et que le Zimbabwe , auparavant exportateur net , nourrissant , et au-delà , toute sa population est devenu importateur.
Le gouvernement , encore respectueux de Mugabe , met cet échec et , au-delà , l'ensemble de ses difficultés , sur le compte des sanctions internationales liées aux processus électoraux défaillants.
Facile.

Je rejoins Harare , la capitale.
J'ai la chance d'être logé chez Paddy et Mark , maison spacieuse et jardin à l'est du centre ville.
Ses grands parents agriculteurs sont arrivés d'Afrique du Sud.
Installés initialement au sud de la Rhodésie , ils sont remontés , agriculture et élevage incompatibles avec la présence de trop nombreux lions.
Nous faisons un grand tour , ville et banlieues , dans la Datsun jaune de Paddy , vintage , que beaucoup lui envient
À Mbare , nord ouest , ensemble de marchands et petits stands précaires , logements collectifs vieillissants.
Malgré cela , chacun et surtout chacune s'habille élégamment et les couleurs sont chatoyantes.
Sous nos yeux , la police déloge sans ménagement les marchands , arrestations et produits confisqués , les victimes se sauvent en courant , emportant ce qu'elles peuvent.
Explication : les élections approchent et ce quartier est détenu par l'opposition.

L'après midi c'est un autre monde.
Au nord , banlieues aisées , très vert et petites collines : Newland , Chisipite , Borrowdale
Écoles à l'anglaise , centres commerciaux huppés avec restaurants , 4 X 4 luxueuses.
Il y a beaucoup d'argent et j'ai toujours la même réponse : les politiciens.
Les villas derrière les murs rehaussés de barbelés et clôtures électriques sont très grandes , on découvre une des propriétés du Président , plutôt spacieuse.

Ces deux mondes ne se côtoient pas.
60 % des enfants ne reçoivent pas une nourriture suffisante.
Le pays a tout , absolument tout , pour vivre décemment ,voire bien
Agriculture , mines , tourisme.
Et pourtant...

Zimbabwe

Dimanche matin , tôt , nous prenons la route pour Chegutu , 100 kms au sud ouest d'Harare.
C'est là que William , un des deux fils de Paddy et Mark , gère la Walden Mine , mine d'or , pour le compte de 3 propriétaires investisseurs de la capitale.
William est un grand barbu , mince , plutôt taiseux , d'une trentaine d'années.
C'est lui qui pilote tout car il sait tout , comprend tout , chimie , mécanique , hommes , calculs.
Il est arrivé il y a qqes mois et amélioré rendements , maintenance et organisation.
Il passe toute ses journées à la mine avec qqes jours par mois retour à Harare.
Nous passons 3 heures à visiter et il est constamment sollicité par ses équipes , 350 personnes , pour donner son avis ou trouver une solution.
Avec une grande gentillesse , il m'accorde plus d'une heure pour un grand tour du site et des explications.

Le Zimbabwe est traversé  du nord au sud par une grande faille souterraine , qui comprend l'essentiel des minerais , cuivre , lithium , cobalt et or.
Walden est située sur cette faille.
À l'extérieur de la ville , au milieu de la campagne , c'est un grand espace gardé où sont réunis la mine souterraine elle même , les installations de traitement du minerai , deux grands espaces pour stocker l'eau , les ateliers de maintenance et les bureaux.
Bruit incessant des moteurs permettant de faire tourner les installations.
Le site a 3 activités :
  L'extraction et le traitement de son propre minerai
  Le traitement du minerai apporté par des mineurs locaux et artisanaux avec la même méthode que celle utilisée pour le minerai appartenant à la mine
  Le traitement du minerai extérieur avec une méthode plus rudimentaire ; ici Ils louent des cuves où tournent en permanence de grandes roues pour broyer les cailloux.
Le traitement plus élaboré s'appelle CIP , Carbon In Pulp , Lixiviation par Cyanuration
Ils utilisent du cyanure pour dissoudre l'or , de l'eau , 600 M3 par jour pour traiter les 600 tonnes quotidiennes de minerai.
Le minerai est tourné , réduit en petits cailloux dans d'immenses rouleaux métalliques.
Lorsque les mineurs locaux gèrent eux mêmes le processus d'extraction d'or sans faire appel aux installations mécaniques de la mine , ils utilisent le mercure , infiniment polluant et dommageable pour leur santé.
L'or doit obligatoirement être revendu à l'état , le prix est actuellement d'environ 50 dollars le gramme.
Les locaux , eux , fondent l'or , le transforment en bijoux qu'ils s'en vont vendre dans les pays environnants.
William me montre une pierre où brillent qqes petits points minuscules , tout ça pour ça...

À qqes kilomètres , au bord d'une route de terre , comme partout autour , nous nous arrêtons auprès d'une minuscule installation.
Qqes mètres carrés , une tente rudimentaire , toit de plastique pour se protéger les jours de pluie.
Deux hommes en attente de leur 4 collègues partis en ville.
Une manivelle permet de descendre au fond du puits , entrée d'un m2 , 32 mètres de profondeur , galeries latérales de 6 mètres , rien n'est étayé.
Ils ont tout creusé à la main , marteau et piton , explosifs.
Ils descendent , chevauchant un seau de plastique , avec leurs deux outils , une lampe frontale , et un casque rudimentaire.
Ils ont trouvé une veine il y a qqes mois puis plus rien depuis , alors ils continuent de creuser , toujours plus profond.
Toujours plus risqué.
Le butin est partagé à 50/50 entre les 6 creuseurs et le propriétaire du terrain.
William me dit que les accidents par effondrement sont fréquents , les pluies et circulations d'eau souterraines travaillent le terrain.
Pas un mot de plainte des deux hommes présents.
La vie telle qu'ils la connaissent depuis l'enfance.
Pour quelques dizaines , centaines de dollars , aléatoires
Pendant ce temps , à deux heures de là , les centres commerciaux tournent à plein et les restaurants facturent des repas , le montant qu'ils gagneront en plusieurs mois.
Si la chance de trouver une nouvelle veine est avec eux.
La veine.
Peut être.
À moins qu'ils ne finissent au fond de la mine effondrée , eux avec

Zambie

Au Taj Pamodzi , mon grand hôtel favori à Lusaka , beaucoup d'agitation , ministres , journalistes , participants , pour deux conférences qui se tiennent simultanément et indépendamment : Transparency International et la Fondation Jimmy Carter d'Atlanta.
Je rencontre des ONG locales , très engagées , enthousiastes.
Au fil de la discussion , totalement libre , je repense aux cinéastes d'Harare , la voisine du Sud , sélectionnés par Netflix pour un film précédent , qui n'avaient pas le droit de réaliser un biopic sur Mugabe.
Je perçois leur implication dans le développement et tout ce qui doit encore être amélioré , le pays arrive de loin.
L'an dernier , le gouvernement du nouveau Président , reconnu par ses pairs africains et au delà , a supprimé les frais de scolarité des écoles publiques , une exception en Afrique Australe.
Au Zimbabwe , la plus petite école publique à la campagne coûte 100 € par an.Quand on sait que toute famille est nombreuse...
Je leur demande quelles sont les priorités , les améliorations les plus attendues. J'attendais santé ou éducation ; surprenamment , unanimement , ils me répondent " gouvernance " et m'expliquent , qu'hérité des régimes précédents , les décisions sont encore trop longues à prendre , l'administration pas assez souple et décentralisée.
Nulle envie de quitter le pays pour trouver mieux ailleurs contrairement à ce que j'ai rencontré au Zimbabwe.
Nous établissons une sélection des 3 " meilleurs " régimes africains , Afrique du Nord exceptée et tombons assez facilement d'accord , sans fixer un ordre :
Botswana
Zambie
Rwanda
On pourrait ajouter , pas loin , Ghana , Kenya , Namibie.
Au final , ici comme ailleurs , la clé réside dans le leader
Masisi , Hichilema , Kagame sont exceptionnels car ils placent l'intérêt de leur peuple au-dessus de tout , ils chassent la corruption , mal endémique , et luttent pour la maîtrise de leurs ressources.
Bien sûr tout n'est pas parfait , mais ,
Les besoins fondamentaux , santé , éducation , nourriture , logement , sont plutôt correctement satisfaits
Et avons-nous mis en Occident seulement qqes années pour atteindre le niveau actuel de développement et de respect des droits de l'homme ?

Les autres , la liste est longue , tellement plus longue , pillent à leur profit personnel , et celui de leurs obligés , clans , tribus , les ressources ; ils ont une vision limitée , très limitée de l'intérêt de leur peuple , l'enrichissement et le maintien au pouvoir constituant leurs deux objectifs principaux , les deux étant intimement liés.
Le Congo RDC constitue une situation à part , la volonté d'avancer du Président Tsichekedi est forte mais se heurte aux intérêts établis , aux ennemis de l'intérieur et de l'extérieur , et , non négligeable , à la taille du pays.

Zambia Congo RDC

À Lusaka , j'échange avec David , le nouveau chef français du Taj Pamodzi.
Taj , c'est la chaîne hôtelière du conglomérat indienTata , un peu moins prestigieux qu'Oberoi , mais équivalent de Sofitel tout de même.
Il vient d'arriver avec sa femme et ses deux enfants.
Elle a travaillé au Meurice avec Alleno et ils ont voyagé pour Taj : Delhi , Londres , Marrakech et maintenant ici en Zambie.
Ils sont bretons et on salive ensemble à l'évocation d'un improbable kouign amann , impossible ou presque ici , le beurre est hors de prix.
Soirées au Duck Inn , Prime Joints.
Ils , elles , reconnaissent la provenance de la musique africaine aux premières notes , Tanzanie , Nigeria , Afrique du Sud , Zambie...
J'en suis bien incapable comme je l'étais avec les accents de chaque pays d'Amérique Centrale ou du Sud.
Évident pour eux.
Le Président Zambien , Hakainde Hichilema , est presqu'unanimement reconnu pour son intégrité et ses efforts pour faire avancer le pays dans le droit chemin.
Un monde par rapport à son prédécesseur qui risque bientôt la levée de son immunité et les procès à suivre.
Il aura probablement quitté le pays avant , Afrique du Sud , Dubaï ...?

Je rentre au Congo RDC après l'avoir quitté pour cette même Zambie il y a 6 semaines.
Par le nord-est , la Copper Belt , le pays est le 7 ème producteur mondial de cuivre et 2 ème africain.
Les chinois sont partout , même des stations essence sont à leur nom.
Immenses mines que l'on devine en bordure de route , usines de traitement colossales , villes totalement dédiées.
On prend ici la mesure de la puissance du monde industriel , des besoins pharaoniques de minerais , de l'implication des groupes étrangers.
L'échelle des bâtiments , les milliers de camions qui attendent des semaines pour monter vers le Congo au nord , bloqués en attente de douane.
Véhicules miniers , containers , tuyaux , bobines , pneus géants ... toutes les fournitures attendent leur livraison , en provenance de ces mêmes pays industrialisés pour participer au grand jeu de l'économie mondiale : appétits féroces , exploitation extrême , enjeux financiers , opacité , tout est là , sous mes yeux , fasciné , effaré , comme une magistrale leçon d'économie mondiale.

Les derniers 25 kms pour atteindre la frontière congolaise de Kasumbalesa se déroulent sur une route totalement défoncée , double file ininterrompue de camions , chaos total qui annonce l'étape finale.
Kasumbalesa est dantesque.
Immenses flaques d'eau , pas d'évacuation , routes en terre , tension palpable à l'approche de la frontière , ordures répandues partout , petites cahutes marchandes faites de bric et de broc , camions embourbés , trafic bloqué , klaxons , cris , musique.
J'arrive vendredi à 18 heures.
La douane vient de fermer jusqu'au lendemain 6 heures.
Je dors à quelques pas de là , Executive Lodge , correct au final , boîte de nuit non insonorisée , très sonore , bières , écrans pour suivre le championnat de football anglais , comme partout pendant ce voyage.
Retour matinal à la douane , sortie de Zambie facile , bien organisée.
Le stratagème monté avec Camille , nécessité d'un retour d'urgence à Paris ne les effleure même pas.
La douane congolaise me refuse et m'envoie au Consulat de Ndola pour refaire le visa.
3 heures de route , en partie défoncée , taxi hors de prix.
J'arrive pile à l'heure et reçois le visa en qqes minutes , moyennant finances.
Retour en 6 heures à Kasumbalesa , je cours avec mes valises et sacs , le porteur me suit avec le reste de mon barda.
17.50 , je ressors de nouveau de Zambie et me représente à la douane congolaise.
Palabres , intermédiaires , finalement c'est non : je ne suis pas résident zambien.
La belle affaire , bien sûr que non , je suis touriste.
Le responsable des finances de la douane explique suffisamment fort :
" Il faut refouler le français " 
Je repars , rentre de nouveau en Zambie , toujours aussi aimables et serviables.
À la sortie , je rencontre James et une amie qui part visiter ses enfants à Johannesburg.
Son frère travaille au poste de douanes de Sakania , l'autre est le procureur du Haut Katanga à Lubumbashi.
Sakania est proche de Ndola , au sud , nous y retournons dans l 'anarchie de la circulation de nuit.
Samedi matin donc , poste de douane de Sakania.
Avec James
Son frère , malade , est absent.
Je re re quitte la Zambie , toujours sans encombre.
Premier contrôle congolais , je ne suis pas résident zambien...
Attente interminable , je deviens vraiment nerveux.
Chacun appelle son chef , et arrive le responsable local de la DGM , Direction
Générale de la Migration.
Surprise , vêtu son col roulé blanc impeccable , il donne son accord en souriant.
James le connait bien et tout s'est joué entre eux dans son bureau.
Tampon sur mon passeport , enfin , wouahhhh.
Passage au bureau des Services Secrets qui accepte de ne pas fouiller mes 4 bagages , James contribue , sur mes fonds.
Je suis au Congo RDC et peux rejoindre Lubumbashi , yes , oui.
40 heures.
Au total, mes deux entrées au Congo RDC , depuis Paris et la Zambie , m'auront coûté plus que le billet d'avion.
Encore du travail Président Tsichekedi.
Mais c'est tellement bon de revenir au Congo malgré ces tracasseries.
Il me reste une dizaine de jours.
J'ai bien l'intention d'en profiter pleinement et ultimement.

Congo RDC

Kolwezi

En 1978 , un mouvement de rébellion met la ville à feu et à sang.
Indépendantistes katangais soutenus par des forces extérieures , angolaises et cubaines notamment.
La France et la Belgique , en désaccord opérationnellement , envoient leurs forces , la légion pour la France , pilotée au sol par un ancien militaire belge.
En qqes heures , la ville est sous contrôle , plus de 200 morts côté expatriés et belges , plus d'un millier côté zaïrois.

Kolwezi est une ville minière , au cœur de la région minière la plus dense du Congo RDC.
Cuivre , uranium , cobalt.
La ville est très étendue , plutôt bien entretenue , sans charme particulier , une grande avenue bordée de bâtiments plus ou moins récents , et les échoppes traditionnelles.
Tout se passe à l'extérieur , plus où moins loin , dans les mines.
Les bus sont bondés de mineurs , vêtements voyants bleus ou oranges , partant au travail ou en revenant.
Partout on peut acheter l'équipement indispensable , outils plus ou moins sophistiqués , tenues pour descendre au fond des mines.
Les hôtels sont chers , occupés par des expatriés , belges et sud-africains le plus souvent , en mission , experts de tous les métiers requis pour faire fonctionner cet immense business.
C'est un peu comme une plateforme pétrolière : ils travaillent plusieurs mois , sans repos , et rentrent un mois chez eux , gagnant beaucoup.
Un monde à part.
À qqes kms , se prépare à ouvrir une des plus grandes mines de cuivre du pays : Kamoa.
Mais les sites sont nettement plus petits , relativement , que ceux du nord Chili et Papouasie Nouvelle Guinée notamment.
Et ils comprennent aussi de nombreux petits puits artisanaux.
Comme partout , une certaine opacité règne sur les opérateurs , propriétaires et , bien sûr encore plus , les circuits financiers.
On m'évoque un intermédiaire libanais , vivant à Dubaï , visites en jet , qui vendrait pour un million de dollars de minerais par jour , cash.
Glencore , les suisses maîtres du monde minier.
Ivanohe , canadiens .
Les chinois.
Beaucoup
Partout
30 000 dans la région
14 casinos ouverts 24 heures sur 24.
Magasins , hôpitaux à leur nom partout en ville.
Tolérés mais pas plus , ils auraient ordre de ne pas se mêler à la population locale , et
ça , ils respectent parfaitement.
Ils achètent le minerai et l'expédient hors du pays pour le traiter ailleurs , en Afrique Australe voire en Chine.
Il est question de sévir , quand , comment ? Toujours l'opacité.
Auparavant , toutes les ressources appartenaient , plus où moins , à la société d'État Gécamines.
Le fils Kabila , précédent Président , l'a beaucoup délestée , au profit d'intérêts privés et des siens. 
Tshisekedi essaye de remettre de l'ordre dans tout cela.

La grande affaire , cela bruisse partout et singulièrement au Katanga , c'est l'élection présidentielle fin 2023.
Tsichekedi se présentera pour un second mandat , c'est entendu.
En face , ici , on parle beaucoup de Moïse Katumbi , officiellement candidat , un des hommes forts de la région , ancien gouverneur du Haut Katanga , propriétaire du club de football Mazembe de Lubumbashi qui fait des malheurs sur le continent ; immense ferme près de Lubumbashi avec 1 400 employés , homme d'affaires , pêche , transports , services miniers ...
Personnalité africaine de l'année en 2015;
Son nom revient souvent et on évoque une alliance possible avec Kabila , la revanche du Katanga.

Je rencontre Éric ,70 ans
Chef belge de Namur qui a passé l'essentiel de sa vie au Congo RDC.
Il est indéniablement doué , je n'oublierai pas de longtemps son steak au poivre.
Il a officié pour les trois précédents chefs d'état , tenu La Grignote pendant 20 ans à Lubumbashi , table renommée.
Approvisionnement depuis Bruxelles , vol direct à l'époque , foie gras , coquillages , gibiers , chocolat ... no limit.
Il régalait Mobutu qu'il regrette.
Joseph Kabila , le père , un grand également , je rapporte.
Beaucoup plus dubitatif sur les deux successeurs , Laurent Désiré qui lui avouait ne rien savoir , il a vite appris , et Félix , je le sens plus réservé.
Incontestablement , et peu importe le regard et l'opinion que l'on puisse porter sur cette époque , il a traversé des années d'absolue folie où l'argent était gagné , dépensé , étalé
Il organisait des réveillons de fin d'année à plusieurs centaines de dollars , plus de 200 personnes , beaucoup d'alcool et tout et tout.
Nous nous entendons sur qqes bonnes adresses bruxelloises , notamment le " Comme chez soi " , qu'il a pratiqué.

Je rentre à Lubumbashi puis Kinshasa.
Dernière semaine.

Congo RDC

À Lubumbashi , j'échange avec Khaled , grands parents venus du Liban pour faire des affaires puis s'établir
Il est dans le mining
Dans le triangle de la mort , fief des Maï maï , indépendantistes.
Il a une concession où travaillent plus de 1 000 personnes , surtout du cuivre , il veut automatiser l'exploitation et doit investir pour cela.
Officiellement il a réglé 50 000 dollars pour l'emplacement ; 300 000 en réalité , beaucoup de documents officiels à obtenir...
Il revient sur les circuits :
Très peu de minerais traités sur place , l'essentiel en Tanzanie ou Asie via le port de Dar es Salam.
Lui nettoie à l'eau et exporte vers des traders , puis fondeurs asiatiques avant de fournir Samsung et tous les grands industriels  de la téléphonie , notamment.
Tout est là :
Étain
Coltrane
Lithium
Tungstène
...
Une dizaine de minerais , souvent mélangés tellement le sous sol est riche et abondant , d'où également des difficultés de traitement pour tout séparer.
ITA , organisation internationale , trace les provenances pour éviter que ne soient utilisés dans notre électronique des minerais provenant de :
  Guerres
  Enfants exploités
  Blanchiment 
À l'est du pays , Kivu , essentiellement coltrane , étain , ici au Katanga , cuivre , cobalt , uranium
Historiquement , tout ou l'essentiel était logé dans la Gécamines , holding d'état , qui possédait plus ou moins tous les actifs post coloniaux belges.
Mobutu a laissé aller et le FMI , face aux difficultés financières du Zaïre , a ordonné de céder une grande partie des mines.
Ce à quoi se sont employés les Kabila père et fils
Avec bonheur.
À Lubumbashi toujours , je croise l'héritier Foreest , dynastie belge qui possède tant
et tant ici , entreprises , terres , un empire qui se maintient.
Beaucoup de belges congolais au bar de l'hôtel , nés , élevés ici , toujours entre deux avions avec Bruxelles.
Le Congo c'est leur pays qu'ils aiment , double nationalité , histoires mêlées , avoir été , être encore ,  mais moins ou différemment.

Lubumbashi est à 1 200 kms de Kinshasa mais les routes sont impraticables.
L'aéroport est local mais impossible de se débrouiller seul , surtout comme musungu , mot bantou pour désigner autrefois les vagabonds ,  donc je paie pour :
  Entrer dans la zône de l'aéroport
  M'acquitter des taxes de vol
  Les surcharges de bagages
  Éviter que l'on ouvre mes valises
  Le coordinateur de tout l'ensemble
Très vite l'envie de négocier disparaît , seul demeure le désir de décoller ; et ça fonctionne très bien.
À l'arrivée à Kinshasa également , pareil en moins cher , j'ai mon contact qui m'attend. 
Sur le tarmac , une flotte de jets privés , Angola , Russie , Chine...
Les chinois , je les ai rencontrés au Pullman de Lubumbashi , parfaitement bilingues , business in Congo
En partance pour Asmara , Erythrée.
Another business.

En embarquant pour Kinshasa , je rencontre B.
Citoyen américain , canadien , d'origine indienne.
Dans la finance US auparavant , son épouse à l'ONU.
Désormais dans les affaires , principalement au Congo RDC , avec ,  et pour le compte d'investisseurs.
Il privilégie ce pays où il a ses contacts , où tout se déroule en dollars rapatriables et où les opportunités sont à l'échelle du pays et de ses ressources.
Il est basé ici mais voyage en Afrique et USA où il réside également.
Il ne dit pas tout et je respecte mais ses activités sont nombreuses et variées ici.
Ses contacts économiques et politiques sont de premier niveau , au-delà même.
Avec lui , chez lui , se sont prises ,  et vraisemblablement se prendront , les grandes décisions stratégiques nationales.
J'en ai la preuve au diner ensemble à Kinshasa , impressionnant.
Côté business , impossible d'aller plus haut , ils sont venus chez lui , ici au Congo RDC , des noms que tout le monde connaît , lui les pratique.
Il est très discret et le peu qu'il évoque ne peut figurer ici.
Je comprends un point : les leaders , propriétaires de ces sociétés devenues monstrueusement puissantes , par leurs pouvoirs et capacités financières , développent des ambitions et projets , parfois hors de leurs activités présentes ,  leur permettant à la fois d'assurer une nouvelle domination , de développer leurs affaires et parfois de répondre à des ambitions personnelles de nature plus morales ou philosophiques.

Ainsi va cette région
Ainsi vont le pays , le continent , le monde.
Décomplexés
S'offrant aux plus offrants
Terrains de jeux des affaires et des tensions internationales.
Pour satisfaire les envies , les besoins de tous , intermédiaires , consommateurs.
Ici , des lois , pas de lois , l'argent , le pouvoir , les enjeux , les tribus , les conflits , les politiques , affrontements d'entreprises , de pays , chacun se sert , au mieux , aux dépens.
Les pauvres creusent

Pour qu'en surface , les autres puissent participer à ce gigantesque jeu économique et financier , s'enrichir jusqu'à l'outrance : un intermédiaire , bien connu , vend pour un million de dollars de minerais par jour.
Cash.

Fascinant
Éprouvant
Terrible 

8 milliards
Bientôt 10
2 en 1900
Trop , tellement trop
l'Afrique : 1.5 milliards aujourd'hui , 4 milliards fin du siècle.

Next
Next

Southern Africa (EN)