East Africa / 1

Kenya Airways à Roissy.

Tout de suite dans l’ambiance , pas encore décollé , on discute avec les hôtesses à l’arrière , boissons offertes quand on roule sur le tarmac , et en prime , elles me donnent les 3 adresses à ne pas manquer pour sortir à Nairobi :

• Bar Next Door

• Empire

• XS Millionnaire

Mon guide est rarement à jour sur ce type d’informations , les bons tuyaux changent souvent.
Un an depuis mon séjour précédent au Kenya.
La saison des pluies a commencé dans la région , alternance d’averses et de périodes ensoleillées.
Je me sens bien à Nairobi , j’ai désormais mes repères , mes habitudes.
À commencer par mon hôtel , Chester House , CBD , Central Business District.
12 ème étage , vue impressionnante , y compris sur le marché aux fleurs qui se tient du milieu de la nuit à l’aube.
Chambre spacieuse , cuisine , 60 USD.
Dans la rue , le CJ’s Café , chaine propriété d’une famille somalienne , qui a essaimé ses enseignes jusqu’en Ouganda.
Deux étages , presque toujours pleins , service efficace , j’y mange bien et retrouve Moshe , le directeur , qui m’accueille d’un bonjour Thierry 😉.
La ville bouillonne , beaucoup plus active que celle que j’avais connue , Covid , au moins les précautions sont sur le départ et les touristes revenus.
Je vais consacrer l’essentiel de mon escale de 2 jours à faire imprimer un millier de photos.
Je connais le laboratoire , ils me reconnaissent également.
Tenu par une femme d’origine indienne , dont l’un des employés , doué plus que moi , facile , extrait mes Google photos de mon téléphone , et prépare tout , de façon à ce que je puisse sélectionner dans les 4 / 5 000 , Faroe Islands puis Amérique du Sud.
Travail éreintant qui m’occupe 2 soirées , choix difficiles , je m’arrête au milieu du Pérou.
Reste le sud péruvien , la Bolivie et le nord de la Colombie.
Je finirai à Kigali.
La qualité est très bonne , les prix compétitifs , le service au top.
Restera à coller dans des albums , qui eux , ne subiront pas d’obsolescence technologique.
Tout passe très vite donc , juste le temps de donner le carton de vêtements de bébé préparé par Camille , le bonheur de voir le sourire.
Également l’ordinateur pour Dovi , 10 ans , je viens de recevoir sa photo tellement heureuse devant son écran.
Retour le vendredi à l’aéroport , longeant l’autoroute de 23 kms qui permettra dans qqes jours de rejoindre le centre ville pour 3 euros.

Les chinois ont avancé vite en un an , le béton est magnifique , des plantes vertes ceignent chaque poteau : beau travail.

East Africa / 2

Il faut une heure et demie pour rallier Kigali , Rwanda , depuis Nairobi.
Survol de la partie méridionale du Lac Victoria , puis on aborde les plaines humides et les vallons nord tanzaniens , avant , enfin , de fondre sur Kigali , routes harmonieuses , pistes en latérite ocre foncé , toits métalliques rouges le plus souvent , parfois bleus .
C'est la saison des pluies , du vert , à l'infini du vert , sous toutes ses teintes et déclinaisons.
Et ce paysage unique de collines à l'infini et de lacs.
La sérénité et l'ordonnancement se devinent déjà à 10 000 pieds.
J'étais ici il y a un an jour pour jour.
Je retrouve l'aéroport impeccable , l'accueil bienveillant et les tests covid dans le hall.
J'aime le Rwanda .
Cette année , c'est Carla qui m'y a fait revenir.
J'ai débuté les cours de français avec elle à Amsterdam , pour Heineken.
Elle est ici depuis qqes mois , en charge de l'informatique et du digital.
Carla est de Lagos , Nigeria.
Ici le français est avec l'anglais et le kinyarwanda une des 3 langues officielles.
On a décidé d'accélérer et de faire plus intensif en un mois.
À la campagne , c'est surtout le kinyarwanda ou un dialecte local.
À Kigali , français ou anglais , parfois , plus rarement les deux.
Première soirée chez son manager , Étienne , bordelais , patron de Heineken Rwanda , premier employeur privé du pays.
Villa de rêve
Breathtaking view , piscine , jardin en pente.
Charismatique et chaleureux , un beau moment d'entrée.
Kigali , c'est toujours aussi magique.
Des dizaines de quartiers le long des pentes vallonnées , avenues et rues impeccables , circulation contrôlée , motards casqués , bus à l'heure .
Le développement immobilier s'est accéléré depuis l'année dernière .
Beaucoup d'espaces verts.
La ville bouge et en même respire sérénité , et contrôle.
On se sent en sécurité absolue partout.
C'est pour moi , une sorte de Suisse en Afrique.
Je reviendrai sur l'histoire dramatique du pays au 20 ème siècle et en 1994.
Mais ce qu'a fait Paul Kagamé , le Président depuis 2 000 , en 28 ans , est incontestable et , connaissant l'Afrique , proprement inouï.

Une de mes premières visites est pour la librairie Ikirezi , au pied de l'ambassade des Pays Bas.
Premier étage d'un bâtiment moderne , vue plein nord sur le centre ville au delà des espaces verts qui tapissent le fond du vallon.
La librairie partage son local avec une très bonne cafétéria et on peut déguster sur une petite terrasse à l'étage.
La sélection est excellente , mélange de littérature , économie , voyages.
Et bien sûr tout ce qu'il faut , et au delà , pour comprendre l'histoire complexe et tragique du pays .
C'est un néerlandais qui la tient avec son épouse en parallèle avec leur équivalent à Goma , Congo , où j'avais fait sa connaissance l'année dernière.
Hirsute , volubile , le courant passe toujours aussi bien.
Dans une autre vie il était professeur d'économie à la LSE , respect.
Il a encore des fonctions de conseil dans des organisations internationales , nous en reparlerons un autre jour , il attend une méga livraison bloquée jusqu'alors en douane .
Je repars avec des cartes détaillées , capitale et pays et un livre d'interview passionnant de Paul Kagamé.

Dimanche , direction le CSK , Cercle Sportif de Kigali , une équipe de basket est sponsorisée par Heineken.
J'y rencontre un champion national de ping pong , compétiteur jusqu'en Chine.
Je vais prendre 3 leçons par semaine avec lui , l'enseignant se retrouve élève.
Une heure c'est épuisant , mais la sensation de progrès est palpable , il faut principalement me défaire de gestuelles de 40 ans de tennis.

Je décide de partir en moto 3 jours pour un tour au sud est du pays .
Les routes sont impeccables , la vitesse , 60 / 80 , contrôlée par des équipements haut de gamme.
De toutes façons , la prudence et la culture du raisonnable sont de mises pour la conduite comme pour tous les autres aspects de la vie.
Après 50 kms plein sud et pour éviter de traverser la frontière avec le Burundi , je prends plein est , pistes de terre pour plusieurs heures.
Autant Kigali est développée , architecturalement , autant je me retrouve vite comme si souvent en Afrique , petits villages traversés par la piste , enfants criant sur mon passage.
Les pluies ont gonflé la rivière principale , je passe en embarquant ma grosse moto sur une barque avec les vélos et les régimes de bananes plantain.
Partout , sans aucune exception , la gentillesse , le sourire et l'accueil.
Plus de 5 heures de route ce premier jour , nuit à Ngoma , grand hôtel moderne et bien tenu
Plein nord le matin pour rejoindre Kayonza , étape plus courte sur une route goudronnée.
Je loge à Urugo éco lodge , Women's Opportunity Center .
Au milieu d'un beau jardin , des tentes en dur , ultra confortables .
Des donateurs américains ont aidé ce beau projet promouvant les femmes comme le Rwanda le fait si bien sous l'impulsion ferme et déterminée des pouvoirs publics.
50 % de femmes siègent au gouvernement.
Le lodge comporte également une activité agricole , lait et produits transformés et un centre d'artisanat à se pâmer , variété , qualité , prix.
Je repars plus chargé qu'en arrivant , on ne se refait pas.
Retour sur la route mouillée à Kigali en début d'après midi.
Café en plein centre à l'hôtel des 1 000 collines .
L'hôtel, qui a inspiré le film " Hotel Rwanda " , a abrité et permis de sauver plus de 1 200 personnes lors de la tragédie de 1994 .
Ceci fut notamment dû à son directeur Paul Rusesabagina , décoré par G.W. Bush en 2005.
Mais son rôle est en même temps très controversé , il est visé désormais par un mandat d'arrêt établi par la justice rwandaise.

L'histoire est infiniment délicate , éminemment douloureuse , un million de morts , génocide essentiellement .

À suivre.

East Africa / 3

Le nom Rwanda vient de " kuu anda " qui signifie dispersion et désignait la progression d'un peuple défendant son territoire ou conquérant de nouveaux.
Les spécialistes ont retrouvé des traces de la langue parlée jusqu'à Lubumbashi , pointe sud du Congo RDC à 1 600 kms.
Le Rwanda est l'une des plus anciennes nations d'Afrique , construite autour d'une monarchie
Les hutus sont agriculteurs , les éleveurs tutsis , les twas artisans
Mais ce qui dominait était la vingtaine de clans , comprenant tutsis , hutus , twas : le clan c'était l'ubwoko. On pouvait se marier , changer de statut sans considération de son appartenance.
En 1894 , les premiers allemands arrivent dans cette région
1918 , Défaite germanique et , conséquence , la Belgique hérite du Burundi et du Rwanda , en tutelle , le protectorat de la Société Des Nations demeurant.
Pendant de nombreuses années , les belges et l'Eglise vont favoriser les tutsis , discriminer les hutus qui n'auront aucun poste de responsabilité , écartés de tout pouvoir et de l'enseignement.
Les tutsis sont désignés comme collaborateurs de l'administration coloniale.
Les ressentiments vont naître et se développer.
Vers la fin des années 50 se produit un renversement majeur :
considérant les hutus moins éduqués , plus " dociles " , majoritaires démographiquement , les belges abandonnent les tutsis , favorisant désormais les hutus.
Beaucoup de tutsis fuient le pays et se réfugient dans les pays limitrophes
L'indépendance est prononcée en 1962.

Non contents d'avoir mise en place , puis exacerbé la discrimination , jouant alternativement les uns contre les autres , les belges portent , devant l'histoire , une responsabilité absolue.

En 1972 , Juvenal Habyarimana , officier hutu , accède au pouvoir.
Il est considéré comme proche des belges , ferveur religieuse et politiques conciliantes obligent.
En 1990 , sur le flanc nord oriental , ougandais , la guerre éclate.Les tutsis réfugiés veulent rejoindre leur pays , armés.
Ils sont bientôt rejoints par leurs frères et soeurs du Burundi , Zaïre , Tanzanie.
Militairement , c'est le Front Patriotique Rwandais , FPR , qui est en première ligne.
Le FPR fut créé en 1987 en Ouganda où il avait contribué à porter au pouvoir Yoweri Museveni , toujours dirigeant du pays , son fils le Général Muhoozi Kainerugaba s'apprêtant à lui succéder.
Dirigé par Fred Rwigema et Paul Kagame .
Les combattants sont des " inkontanyi " , guerriers infatigables.
En août 1993 sont signés les accords d'Arusha , Tanzanie.
Ils prévoient le retour des réfugiés tutsis , la fusion des armées gouvernementale et FPR , l'instauration d'un gouvernement de transition avec des postes réservés aux tutsis et des élections à venir.
Les alliés extrémistes hutus d'Habyarimana n'accepteront jamais ces accords , entravant leur application , considérant qu'il avait été trop cédé aux tutsis.

Le 6 avril 1994 , vers 20.30 , le Falcon présidentiel qui ramène de Tanzanie les présidents rwandais et burundais est abattu de 2 missiles à son approche de l'aéroport de Kigali . Il n'y aura aucun survivant , compris l'équipage français.
Les missiles furent déclenchés du camp présidentiel , sur la colline de Kanombe.
Qui tira ?
Les extrémistes hutus ?
Le FPR ?
Le juge français Marc Trevidic , qui s'est rendu sur place , ne s'est pas prononcé.

Cet attentat déclencha une des pires tragédies de notre époque , cumul de raisons :

• absence de respect des rituels hérités de la royauté

• étouffement des valeurs humaines

• développement de l'idéologie de race

• déshumanisation des adversaires

• manque de mécanismes correcteurs pour évacuer les tensions
  politiques désastreuses des colons belges associés à l'église

De ce jour du 6 avril au mois de juillet de la même année , environ un million de personnes furent battues , torturées , assassinées .
Massacre des hutus de l'opposition et génocide des tutsis.
Le sang , les agonisants , les cadavres.
Partout , dans tout le pays.
Sauvagerie ultime , enfer.
Les images sont insupportables , elles disent l'horreur.
3 millions , dont des tueurs , fuirent le pays
La communauté internationale refusa d'intervenir.
L'ONU , malgré les demandes pressantes des représentants sur place , Roméo Dallaire en tête , se hâta de ne rien faire ou presque , lenteur coupable , criminelle.
Le 4 juillet , Kigali tomba aux mains du FPR.
Un gouvernement d'unité nationale fut constitué.
Paul Kagame , Vice Président et Ministre de la Défense.
Dans les mois qui suivirent juillet , des survivants erraient dans le pays , à la recherche de restes ou de corps de leurs disparus.
Le mémorial du génocide , exemplaire , fut édifié à Kigali ; dans chaque ville un monument rappelle la tragédie.
La mémoire.
Ne jamais cesser d'oublier
Il est interdit désormais d'évoquer les divisions ethniques , le divisionnisme est proscrit par la constitution
La mention du groupe ethnique sur les documents d'identité bannie
Furent remises en place les " gacaca " , " justice sur l'herbe" , en fonctionnement autrefois , juridictions communautaires en présence de tous.
2 millions de rwandais y furent confrontés , 12 000 enceintes , participation de tous les habitants obligatoire , toute autre activité proscrite , silence absolu de rigueur.
Ces tribunaux permirent également de libérer la parole et confronter les rwandais entre eux.
La consigne : ni revanche , ni amnistie
Pendant ce temps , à Arusha toujours , le Tribunal International pour le Rwanda , jugeait les acteurs principaux.

Paul Kagame et le Rwanda post 1994

Les dirigeants trouvèrent une situation désastreuse à l'été 1994 : tout était à faire
Il fallut tout rebâtir :
un état fort , la confiance et l'appui de l'étranger , l'égalité hommes femmes , la mise en place de cadres de confiance , national et local , la relance de l'économie , l'équilibre des finances , l'apaisement interne , la justice à conduire.
Aucune situation n'était comparable : bourreaux et victimes forcés de vivre côte à côte immédiatement après les massacres , de travailler ensemble après l'inconcevable déchaînement de haine.

Paul Kagame est né en 1957 , 65 ans aujourd'hui , a dû fuir son pays à l'âge de 4 ans .
Il a grandi dans les camps de réfugiés en Ouganda , a appris la chose militaire en Tanzanie , à Cuba , aux USA , il a été Directeur du renseignement militaire de l'Ouganda
Il a dirigé le FPR depuis 1990
D'abord Vice Président dès 1994 , très vite considéré , notamment à l'étranger comme le véritable dirigeant du Rwanda , Paul Kagame fut élu Président de la République en 2001.
C'est un guerrier , un nationaliste , épris de son pays , à la fois moderne , ferme , et qui s'appuie sur la culture et les traditions immémorielles , l'imihigo notamment , contrat moral devant les habitants de réaliser des objectifs pour la communauté , pour emporter l'adhésion et conduire le Rwanda vers un ordre et une modernité impressionnants.
Il est immensément respecté dans son pays et par la communauté internationale , notamment africaine et anglosaxonne.
Il est exigeant , implacable , craint par les notables
Il est obsédé par le résultat , l'autosuffisance , la nécessité d'être traité en égaux avec respect et dignité.
Les faits parlent pour lui : sécurité , paix retrouvée , propreté , croissance , ordre , corruption absente , pauvreté éradiquée, santé , éducation , sérénité , institutions , modernité et développement.
Sur les 54 nations que comptent l'Afrique , j'en ai visité une vingtaine ; c'est beaucoup et peu à la fois.
Nulle part , absolument nulle part , de tels résultats n'existent
En 28 ans , partant de l'enfer : respect absolu.

Venez voir , Kigali belle et ordonnée , l'ordonnancement ondoyant des campagnes , les verts à l'infini , le lac Kivu , Gisenyi , magique
Et cette sérénité , apaisement , calme et douceur , de tous ceux qui vivent en paix désormais ,
Enfin.

Imaginer qu'il y aurait d'autres Kagame disséminés sur le continent...
Il faudra lui succéder ; l'exemple de Mandela est terrible
Ce sera dans sa capacité à faire émerger un ou une leader respecté , pour l'après , que se manifestera , ultimement son talent
C'est peut être , sans doute ? , déjà fait.

Paroles de Président :

J'ai dû opérer des choix difficiles.Ou bien je châtiais mes amis , mes compagnons de la première heure , ou bien , fermant les yeux sur les malversations , je risquais de couler mon pays. J'ai choisi le Rwanda.

Oui , je suis pressé , c'est le seul reproche que j'accepte . Pressé de sortir ce pays de la pauvreté , pressé de permettre à tous mes compatriotes de vivre dignement.

Dieu m'a créé d'une manière bien étrange

Je ne suis pas un saint

Je viens du peuple , et nul n'est plus proche de moi que le plus ordinaire des Rwandais.

J'ai vécu en exil pendant 30 ans parce que ma famille a été chassée du Rwanda.

Même sans que l'avion d'Habyarimana ait été abattu , le génocide aurait eu lieu car c'était un mal insidieux qui envahissait la société depuis 1959.

Ce qui est arrivé découle de la politique de la Belgique et de l'église qui ont divisé la société en groupes ethniques. Ils ont ethnicisé la population , en catégorisant les gens , en créant une division là où il n'y en avait auparavant aucune.

Les nations qui avaient le pouvoir d'éviter un génocide étaient celles là même dont le rôle avait été déterminant dans la création du climat qui avait mené au génocide.

Tout ceci fut l'oeuvre des Belges.

Ils ont délivré des cartes d'identité ethnique dans les années 30 ; ils ont encouragé les populations à se haïr sur la seule question de l'identité ethnique ; ils ont prêché la haine

On attend toujours le mea culpa de l'Eglise catholique

Les juifs d'Israël peuvent nous comprendre mieux que quiconque.

Il y a eu génocide des tutsis , extermination planifiée d'un groupe ethnique , et assassinats de hutus modérés

Nous sommes des gens fiers , nous nous sommes dressés contre le mal absolu sans l'aide de quiconque.Nous n'avons besoin ni de la pitié , ni de la sympathie du monde. Nous nous battons avec nos maigres ressources pour reconstruire notre pays. Pour le reste il y a eu ici un million de morts. Nous ne cesserons jamais d'honorer leur mémoire.

L'impatience est un exercice d'équilibriste entre idéal et réalité

Le développement est un marathon qui se court comme un sprint.

Je suis un nationaliste engagé.

La réconciliation consiste à concilier les différences pour le bien commun

Notre combat quotidien est de réunir , étape après étape , les conditions nous permettant de faire l'économie de l'aide extérieure.
( 40 % du budget )

Nous voulons faire de la connaissance un moteur de notre économie et du bien être de la population.

Ma plus belle réussite professionnelle : être demeuré ce que je suis.

Mon idée du malheur : le génocide , bien que cela surpasse le malheur.

Le Rwanda : petite taille , problèmes titanesques , réussites remarquables.

Mon rêve : un Rwanda prospère et stable. Des Rwandais heureux et fiers d'être Rwandais.

Ce que je nous souhaite , je le souhaite pour l'Afrique.

Bibliographie :

J'ai beaucoup appris de :

/ Jean Pierre Chrétien

/ Colette Braeckman , Rwanda , Mille collines , Mille douleurs Collection l'âme des

peuples

/ Paul Kagame , François Soudan : L'homme de fer , conversations avec Paul Kagame
w Editions Idées du monde

East Africa / 4

Presqu'un mois au Rwanda.
Le temps a filé.
Je repars dans 48 heures en ayant le sentiment d'avoir fait les choses à l'envers : le plus facile , confortable , sécurisé , reposant , avant des lieux plus incertains et compliqués ...
Asi es.
J'ai commencé de prendre mes habitudes à Kigali , mes repères , dans cette ville vallonnée , respectueuse de ses espaces verts , parcs , golfs , zônes de maraichage et horticulture que je sillonne en moto taxi ; les heures de bureau sont assez embouteillées mais on se faufile , toujours casqué , vitesse et priorités respectées , trajet quasi uniformément à 1 euro , sauf la nuit où c'est le double.
- Viennoiseries , redoutables , au Bourbon Café , j'y croise la première conseillère de l'ambassade de France , un signe ...
- Café , Internet , lecture , écriture , rencontres , à l'Hôtel des Mille Collines , à deux pas du Café Bourbon , ils me connaissent désormais , adorables , comme tous les rwandais ; on échange , selon chacun en français ou en anglais , la langue commune est le kinyarwanda.
- Cours de français avec Carla , toujours enthousiaste et avide d'apprendre
- Leçons de tennis de table avec Célestin , progrès certains , je continuerai , ailleurs , facile de transporter l'équipement :-)
- Marché à Kimironko : c'est une sorte de halle , sans la hauteur sous plafond , à taille humaine , avec ses zônes : bricolage , artisanat , cosmétiques , vêtements , compris les couturières devant leur Singer à pédales , qui , au choix , confectionnent ou réparent , et bien sûr l'alimentation . Je me faufile entre les stands , tenus surtout par des femmes , parfois mais pas toujours , avec un ou deux produits phares . J'ai ainsi ma spécialiste en arachides et il y a qqes stands garnis seulement d'avocats ; mais pas les petits , rabougris , durs , mal muris , chers , non , d'énormes , verts , chair onctueuse promise au guacamole . Pour le reste je me laisse porter par l'inspiration et mes déambulations ; chacune essaie , toujours avec douceur et gentillesse de me retenir : haricots secs en tous genres , farines , surtout manioc , riz , légumes , assez proches de ce que nous connaissons finalement. Le paradis ce sont les fruits : ananas , fruits de la passion , tree tomatoe , mangues , oranges et citrons. Pour qqes euros , on tient 2 ou 3 jours , smoothie quotidien au petit déjeuner. J'ai décidé de ne plus marchander , leur laisser un petit peu plus que ce que je pourrais si facilement et dérisoirement obtenir ; leur sourire me suffit.
- Pâtisseries chez Baso : le chef , belge et rwandais s'est imposé ici ; c'est invariablement plein , qqes gâteaux inspirés , tartes chocolat , fraises , paris brest à la vanille , brownies. On prend un café , un jus de fruit pour accompagner les délices sucrés ou un panini maison ; vue grandiose sur une partie des collines de Kigali. A deux pas c'est une des résidences présidentielles , noyée dans les arbres , gardée , très gardée.
- Juste à côté , j'ai découvert Photo Lab : Bakul , famille du Gujarat arrivée au Kenya , né en Afrique de l'Est , il a repris le laboratoire de son père. Il a vécu ici , en plein coeur , les 10 jours suivant le déclenchement du génocide , 6/7 avril 1994 , avant de se réfugier à l'étranger. Non rwandais , il m'explique qu'il n'y avait alors , pour lui et sa famille , pas de danger particulier dans ce court moment.
Une amie m'explique qu'elle a , âgée de 2 ans , perdu ses deux parents et fut élevée par une soeur aînée. Il faut toujours questionner , je le fais assez rarement , seulement quand la confiance s'établit , pour savoir qqes bribes de l'histoire personnelle. Ne jamais oublier que l'horreur et l'abomination sont là , à une génération de distance , tue désormais , enfouie dans les mémoires , mais palpable .Sacrifices indicibles.
Bakul , donc , va m'imprimer des centaines de photos de voyage , travail impeccable que je n'avais pas eu le temps de terminer à Nairobi avec mon IT man , laboratoire indien , sic , je lui promets de revenir ...

J'ai rencontré E. ici à Kigali , nouveau MD , Managing Director , de Heineken et ses multiples marques de bières au Rwanda ; ils produisent et vendent également , sous licence , plusieurs boissons à bulles universellement connues. Charismatique , leader enthousiaste , nous échangeons chez lui et ailleurs , le courant passe très bien ; il est ce 15 mai de l'anniversaire de Carla avec son épouse Fatia.
Je découvre la puissance de ce groupe familial , 159 ans d'existence , redoutablement implanté en Afrique , histoires variées sur ce continent.
Le CEO précédent y a fait une partie de sa carrière , Cameroun , Rwanda , Zaïre.
J'apprends un peu , de l'extérieur , de la culture , de cette entreprise , opportunités ou passages recommandés à l'étranger , Asie , Amérique du Sud , Afrique , Caraïbes , conditions de vie respectables , gestion des carrières , objectifs individuels et collectifs: c'est redoutablement bien fait et efficace : mix d'entreprise familiale , longues traditions , produits icôniques , adaptation et évolutions permanentes , valeurs humaines , rentabilité décente :-) , production , marketing et ventes au top.

Je reviens de 2 jours en moto au Nord Est du pays , jusqu'à Nyagatare.
Une partie du trajet était signalé sur ma carte comme dirt road , off road. Finalement , l'essentiel était en dur , multiples chantiers encore en cours : travailleurs rwandais , pilote chinois reconnaissable à son chapeau de paille cônique.
Pause déjeuner avec brochettes locales et pommes de terre.
Des photos , beaucoup de photos.
Paysages , populations , tout fait envie ici.
Alors je m'arrête sans cesse , et couvre les 150 kms du premier jour en 5 heures.
Le soir , après un bench mark complet et objectif des possibilités à Nyagatare , critère wifi essentiel , je me pose à l'hôtel Epic.
A qqes kms de la ville , espaces verts , moderne , une centaine de chambres type Sofitel , piscine , service et repas impeccables , manager sud africain , direction Accor , le repos du guerrier.
J'y croise une équipe d'influenceurs sénégalais , invités à visiter le pays par " Visit Rwanda " , organisme de promotion du tourisme national .
Le lendemain , route au sud pour Kayonza et découverte , au bord du lac Muhazi , du Vintage Cottage , une dizaine de grands bungalows tout en bois , chambres spacieuses et confortables. Et surtout , le long du lac , silence et quiétude à une heure de Kigali.
J'y bois juste un café sur la terrasse , je dois rentrer le soir même.
Adresse à conserver.

Avant de quitter , à regrets , plusieurs questions :
- Quid de l'après Kagame , déjà mentionné
- Serait il possible que les abominations du passé , si récent , une génération , ressurgissent , Kagame parti ?
- L'Afrique connait elle , enfantera t elle un leader si visionnaire , charismatique , reconnu , talentueux ? J'interroge , on évoque à plusieurs reprises Hakainde Hichilema en Zambie . De toutes façons , j'avais déjà décidé d'aller voir , rendez vous en décembre janvier prochains.

Demain , si tout va bien ,
D'autres cieux africains , 3 000 kms au nord.

East Africa / 5

  East Africa , 5 , Soudan , Sudan

Soudan vient de l'arabe " balad a sudan " , " pays des noirs "

Arrivé dans la nuit de lundi à mardi à Khartoum , via Addis Abeba ; vols incessants , aéroport modernisé depuis mon dernier passage , début des années 2 000. Ethiopian est la compagnie africaine qui truste la majorité des vols , Addis est le hub , intra africain et connections avec Europe , Asie , Amériques. Les seuls concurrents sont Turkish et Emirates.

Je savais , avec près d'un mois au Rwanda , que ce serait le choc : ce le fut.

Difficile de rencontrer sur le continent des situations si opposées , de tels contrastes.

Climat étouffant ici , hier zône des 50 degrés dans le désert , rues partiellement délabrées , qqes troupeaux de chèvres au pied d'immeubles , sable et poussières partout , niveau de vie moindre , plus d'extrêmes , mendiants parfois , et très riches dans les qques grands hôtels , 4X4 comme à Dubaï.

Le sentiment de sécurité est absolu mais la corruption très présente dès qu'on approche autorités ou administrations. Il faut s'enregistrer dans les 3 jours de l'arrivée , fait hier , billet de 100 USD dans le passeport. Il faut également obtenir un permis de déplacement indiquant ses destinations , 20 USD, meilleur marché.

La population est chaleureuse , accueillante , curieuse : rencontres permanentes.

43 millions d'habitants , et 5 à 10 millions de réfugiés , principalement d'Erythrée et du Tigré éthiopien. Statistiques impossibles , aucun papier requis pour travailler , les personnes de l'accueil à l'hôtel viennent d'Asmara , capitale d'Erythrée , niveau d'éducation impressionnant.

C'est compliqué avec l'argent : la carte Visa ne fonctionne pas , il faut des dollars en cash et des livres soudanaises , un euro environ 1 000 SDG , billets de 500 , c'est vite lourd.

Le Soudan , ancienne Nubie , quitte l'Egypte anglo saxonne et devient indépendant en 1956.Problèmes avec les populations de l'extrême nord , du sud ouest au Darfour et surtout au sud , animiste et chrétien quand le nord est à 95% musulman.

En 2011, partition du pays , le Soudan du sud accède à l'indépendance , Juba la capitale , emportant son pétrole , 98% de ses ressources , mais pas le raffinage , encore à Khartoum , ni le pipe qui traverse le nord jusqu'à la mer rouge, vers Port Sudan.

Fin de 20 années de conflits , 2 millions de morts.

Le Soudan , 2.5 M KM2 , laisse la première place désormais à l'Algérie , 2.4 KM2 , plus grand pays d'Afrique pour sa superficie.

Autant l'Egypte au nord est ancrée au Moyen Orient , autant le Soudan est profondément africain ; le Nil , les Nils les unissent .

Revenant d'Addis , j'avais survolé Khartoum , géographie fascinante , puisqu'on y voit les 2 Nils , bleu et blanc , confluer dans la capitale ; j'irai bientôt voir ce qu'il en est au sol.

En 1989 , Omar El Bashir prend le pouvoir , bientôt rejoint par son complice Turabi.

C'est le début d'une longue période d'isolement international , restrictions de libertés et extrêmisme religieux , soutien à la LRA ougandaise , à la guérilla d'Erythrée , appui à Saddam Hussein , accueil à Khartoum de Ben Laden de 1992 à 1996 : le pays devient paria .

J.Carter place le pays sur la liste de ceux soutenant le terrorisme et impose des sanctions très lourdes.

A la suite du 11 septembre , le pouvoir se rapproche de l'occident en livrant des informations sur Al Qaïda , les Usa apprécient cet appui.

Le Soudan se rapproche également de l'Arabie Saoudite à compter de 2015 , soutien diplomatique contre l'Iran , appui militaire au Yémen , aide financière saoudienne.

Les sanctions seront levées par Obama et Trump

La Cour Pénale Internationale a émis en 2009 et 2010 deux mandats d'arrêt contre El Bashir , crimes de guerre et contre l'humanité ; il est renversé en 2019 à la suite de manifestations populaires.

Il est désormais en détention dans un hôpital militaire.

Le pouvoir est entre les mains de 2 militaires qui se remplissent les poches ; je n'ai pas rencontré un habitant disant du bien d'eux.

Je reviens de Meroe , 3 heures au nord est.

Capitale nubienne au 5éme siècle avant JC et pendant 10 siècles.

Clairement des identités avec l'Egypte au Nord.

Je suis le seul visiteur , pyramides moins imposantes ici , mais pierres sombres au milieu du sable ocre , déambulations dans le silence , un peu d'ombre dans les petites nécropoles ou sur le bon côté , pierres si régulièrement taillées , il y a 2 500 ans , visages et corps de l'époque.

La suite , plusieurs projets , tous incertains , visa , avion ...

Inch'Allah

East Africa / 6

Sudan as it comes , morceaux choisis.

Le chauffeur de taxi :

Vous avez combien d'enfants ?
3 , et vous ?
8 , j'ai 2 femmes , un temps , la première était malade , alors elle est retournée dans sa famille.

Je recherche les bons restaurants de Khartoum. Un humanitaire américain me recommande Universal Café.
Tenu par un Italien , de Sienne , le quartier est assez résidentiel.
Il faisait du transport et s'est reconverti.
Il est revenu du pays il y a peu avec de la mozzarella.
Caprese d'anthologie , les tomates sont à se pâmer , ce que je fais.
Pizza puis cheesecake , il y eut des repas pires.

Je m'étais promis d'aller au confluent des 2 Nils ; taxi pour 
Omdurman , nord ouest de Khartoum et accessoirement plus grande ville du Soudan devant Khartoum.
Les 2 Nils se divisent , chacun , avant de se rejoindre.
En regardant vers le sud depuis le pont qui les enjambe , à gauche le bleu , à droite le blanc.
Autant le premier naît en Ethiopie , chutes impressionnantes là bas , autant le second...
Plusieurs théories , j'avais lu le Malawi , je découvre maintenant le Burundi et encore ; pour certains rien n'est prouvé.
Au nord du pont , il n'en reste qu'un , calme et majestueux, jusqu' au Caire et Alexandrie.

C'est impressionnant , quand on interroge la jeunesse ici , la moitié fait des études de médecine.
Pas de soucis de numerus clausus ici.

En quittant la zône de l'aéroport, je croise le convoi présidentiel , retour de voyage : 6 méga 4X4 , militaires armés aux fenêtres , dizaines d'antennes sur le toit.
C'était presque pareil à Kigali quand j'ai croisé celui de Paul Kagamé.
Ici , les  2 militaires qui tiennent, pour l'instant , le pays ont promis des élections pour l'an prochain
Les ministères sont tenus par leurs acolytes.

Le chauffeur de taxi qui me ramène est médecin le jour , 6 euros la consultation. Il m'explique les grands maux du pays , malaria comme si souvent en Afrique , mais aussi trachoma et onchocerciasis transmis par les insectes qui se posent sur le visage et les yeux mal lavés ou avec une eau malsaine et peuvent entraîner la cécité.
Plus je rencontre d' Erythréens , ayant fui le pays et son service militaire obligatoire sans limite de temps , ayant fui donc au péril de leur vie à la frontière , plus j'ai envie d'y aller , voir Asmara , " la petite Rome " , et son architecture italienne figée dans le temps.
C'est la semaine de commémoration de l'indépendance , ambassade fermée.
Prochaine fois.
Faute d'Erythrée , j'ai 2 plans B.
Essentiel d'avoir toujours une solution de rechange en voyage où l'incertain côtoie l'impossible.
Un seul suffira.
l'Arabie Saoudite est juste en face du Soudan.
De l'autre côté de la Mer Rouge.
Visa impossible sur l'application e visa , le paiement ne passe pas ici.
À l'ambassade, on me dit de revenir le lendemain.
No way , pas le temps.
Je reviens à midi , consulat fermé.
J'insiste.
Lourdement.
Ils finissent par me laisser entrer.
Accueil impeccable sous le portrait de MBS et de son père Salmane al Saoud.
3 heures d'attente et mon passeport est enfin tamponné.
Un visa de tourisme directement à l'ambassade , ils ne me croient pas à l'hôtel.

La nuit même je prends le bus pour Port Soudan : 14 heures de route , 5 / 600 kms .
Climatisation , écrans , repas servis.
Le bus est plein.
Je dors beaucoup , rattrapage des courtes nuits de Khartoum.
J'arrive à Port Soudan en début de soirée.
Taxi pour le Red Sea Resort , recommandé par le propriétaire de l'hôtel de Khartoum.
L'ensemble est au bord de la Mer Rouge , 30 kms au nord.
Bungalows au bord du lagon , accueil chaleureux.
Vent doux , température idéale.
Finie la torpeur de Khartoum à laquelle j'avais fini par m'habituer.
Le matin , je rencontre Iman , la soixantaine plus embonpoint.
Elle a conçu et fondé ce resort il y a une vingtaine d'années sur le terrain somptueusement situé.
D'abord un village de tentes emportées par une tempête d'anthologie ; elle a reconstruit l'ensemble actuel , une douzaine de bungalows , cuisine , centre de plongée , grande terrasse couverte pour les repas.
4 enfants , elle a épuisé 2 maris , travaillé aux Pays-Bas chez Philips.
Pour financer , elle a cédé 50 % à des Jordaniens , qui veulent maintenant récupérer leur mise plus value incluse : 1.5 M$ pour compenser leurs pertes en Syrie
Elle me sonde...
C'est une personnalité dans la région où elle connait toutes les autorités.
Son père était un personnage du régime dans les années 60 / 70 , ambassadeur en Yougoslavie.
Le soir , je rencontre avec elles des officiers de la marine locale , Port Soudan est la base principale du pays sur la mer.

Au large , l'eau bleue marine et claire marque les grandes profondeurs.
Je traverse le lagon à pieds jusqu'aux tombants.
Environ 500 mètres , j'enfile les palmes et me laisse porter au dessus du premier fond , à une quinzaine de mètres de profondeur.
J'ai plongé à Djibouti et Madagascar , chaque fois l'enchantement.
Requin baleine dans la baie de Djibouti.
La Mer Rouge déjà.
Ici , de nouveau , spectacle renouvelé , toutes les formes , tailles , couleurs , par centaines , pas effrayés.
J'ai un faible pour les petits rayés noir et blanc et les plus grands , jaunes avec le tour du corps bleu turquoise.
Grandiose.
Personne.
Seuls eux et moi.

Au retour , Abas me propose de l'accompagner sur son bateau de pêche le lendemain.
Il a travaillé pour des armateurs grecs une vingtaine d'années , fait le tour du monde et s'est retiré dans sa région.
Il me raconte ses aventures ici , me confirme que le barracuda est définitivement un des plus dangereux , imprévisible et agressif.
Il y a qqes mois , un requin tigre a tourné autour de son esquif de 4 mètres pendant 2 heures...
Même s'il aime la marijuana et que ça n'a duré qu'une seule heure...
Je ne mange pas de poisson et j'aimerais bien que ce soit réciproque.

On finit la soirée avec une shisha et un délicieux café parfumé au gingembre.

Le personnel est adorable , accueillant ,  hospitalité chaleureuse.
Je mange bien, je lis , enfin , j'écris
Le site est magnifique.

Je vais rester un peu plus longtemps que prévu.

East Africa / 7

Jeddah a qqe chose de Los Angeles.

L'Arabie Saoudite a qqe chose de la Californie.

Immensité , plutôt plat , grands malls , autoroutes XXL , stations services , 50 centimes le litre, avec zône commerciale , soif d’acheter.

La comparaison s’arrête là , 20 degrés en plus déjà , air conditionné partout.

Ici l’islam est religion d’état et c' en est le berceau.

Des mosquées omniprésentes.

Les Salman , père et fils , MBS et Salman ben Abdelaziz Al Saoud ,veillent en portraits géants sur leur pays , géant , 2.1 km2 ,essentiellement désertique , 32 millions d'habitants ,qui a décidé de se projeter dans l’après pétrole.

La grande majorité des petits jobs sont occupés , comme aux Emirats , par des indiens , pakistanais , bangladais , soudanais , philippins , égyptiens , népalais.

Ceux-ci sont indifférents , accueillants , serviles , curieux , c'est selon

Pas que les petits jobs d'ailleurs , quand les saoudiens ne suffisent pas , nombreux soignants égyptiens par exemple.

Parfois un chauffeur de taxi ou un réceptionniste est saoudien , rarement en fait.

Surprenammant , assez peu de police , aucun contrôle.

Je redoutais un sentiment d’oppression , il n’en est rien , chacun vaque indifféremment.

Les mœurs changent :

Les femmes conduisent

À Riyad , plus de 80 % ne portent plus de niqab et parfois plus d'abaya.

Tout dépend des régions , c'est plus traditionnel quand on s'éloigne des grandes villes.

Me concernant , j'ai rencontré une majorité de femmes couvertes qui refusent absolument de montrer leur visage.

Assez déconcertant de ne pas savoir à qui on a à faire...

Pour les relations hommes femmes , c'est plus compliqué.

De savoir la vérité , les vérités.

La version officielle , la plus fréquente , c'est rien avant le mariage.

La réalité , semble moins univoque.

Et clairement plus souple à Riyad

Mais difficile en un court délai d'en savoir plus , singulièrement sur un sujet aussi délicat.

Je rencontre une étudiante qui va partir faire son master en Floride.

L'état prend tous ses frais en charge car elle parle bien anglais et ses résultats pré universitaires sont bons ; à terme elle vise la diplomatie.

Nous échangeons et elle finit par me demander , c'est touchant , à quoi on reconnait qu'on a rencontré le bon partenaire.

Je lui donne ma version , elle semble satisfaite.

Un monde nous sépare encore même si les civilisations se rapprochent , surtout en ville et dans la jeune génération ; les réseaux sociaux contribuent également.

Djeddah c’est vaste , la Corniche , avec son jet d’eau de nuit qui fait ressembler celui de Genève à un Manneken-Pis souffreteux.

Malls , voies rapides où on circule vite et bien , restaurants ouverts tard la nuit quand la température baisse de qqes degrés , palaces en bord de mer , principal port du pays.

Je passe peu de temps à visiter , mon but c’est La Mecque à 80 kms , première ville sainte pour les musulmans avant Médine et Jérusalem.

Pour les chiites , il faut ajouter , en Irak , Nadjaf , Kerbala et Samara.

La Mecque , lieu du hajj , pèlerinage , un des 5 piliers de l’islam.

Il existe un pèlerinage moins important , autres lieux près de La Mecque , l’oumra.

Tout musulman doit se rendre à la mosquée Masjid al Haram au moins une fois dans sa vie , nombreux le font plusieurs fois.

La ville est grande , 1.7 millions d’habitants , très dense quand on s’approche des lieux saints , immeubles de plusieurs dizaines d’étages , hôtels et logements , serrés , enchâssés entre les montagnes environnantes , centres commerciaux en rez de chaussée , boutiques traditionnelles , souvenirs religieux , bijoux , parfums , vêtements...

Les hôtels de luxe , notamment l’Inter Continental , donnent directement sur la mosquée , on quitte le hall d'accueil , on se retrouve sur l'esplanade principale , sol blanc immaculé de marbre.

La foule entre et sort , flot incessant , de la mosquée par plusieurs portes numérotées , accès à l’intérieur à la kaaba , cube de granit noir , vide à l'intérieur recouvert de tissu autour duquel tournent 7 fois les fidèles. Ses portes sont recouvertes de 280 kgs d'or.

C'était originellement un lieu de culte de la religion arabe pré-islamique. En 630 , elle a été vidée de ses statues , le vide signifiant que l'on ne peut adorer que Dieu à l'exception de tout objet matériel , toute idole : le judaïsme partage cette conception.

Des dizaines de milliers de musulmans aujourd'hui , rien par rapport à l’époque du ramadan , par centaines de milliers alors.

Bien sûr qqes gardes et policiers , mais rien de très impressionnant compte tenu de la foule.

La surprise , et ce ne devrait pas en être une , c’est de croiser tellement de nationalités , au premier rang desquelles les Indonésiens , reconnaissables à leur petit chapeau.

Logique , c’est la première nation musulmane du monde , près de 220 millions de pratiquants.

Et avec 1.9 milliards de croyants , l'Islam est la deuxième religion au monde , après le christianisme.

Pakistanais , indiens , nombreux africains et moyen orientaux.

La journée est rythmée par les 5 prières , tout s’arrête alors.

On mesure , alors , mieux la foule immense , rassemblée , hommes et femmes séparés.

Il se dégage de ce lieu un sentiment de puissance et d'unité au delà des frontières , physiquement palpable.

On m’avait dit interdit aux non musulmans.

Faux , seul non musulman ce jour là , je peux aller jusqu’aux abords de la mosquée , sans , toutefois , entrer et voir la kaaba.

Le soir , les minarets sont illuminés, vert , couleur de l'Islam , dernière prière juste après 20.00.

J'ai vu , de par le monde , tellement de pratiquants qui se tournaient vers La Mecque ; ici pas d'erreur , c'est la kaaba qui guide , derrière les hauts murs de la mosquée . Frustrant , très frustrant , mais c'est ainsi.

Je rentre de nuit à Djeddah , train le matin pour Médine.

La gare est somptueuse et presque vide si l’on considère sa taille.

Immenses panneaux sombres qui laissent filtrer la juste lumière nécessaire , volumes hors de proportion , sol noir en pierre , et si le luxe c’était l’espace :-).

Quelque chose de la sobriété et de l'élégance du Louvre d'Abu Dhabi , la rotondité en moins , ici tout est rectiligne.

L'architecture est un art majeur et magique.

Ce pourrait être Jean Nouvel , erreur c’est Foster , bureau de contrôle français.

Bagages pris en charge par un employé indien ou népalais.

Je n’ai pas de billet , tout se fait par application de la Haramain High Speed Railway , la compagnie nationale de chemins de fer ; je finis par y arriver.

Avec de l’aide…

Trains style TGV , confortable , climatisation évidemment , bar , le Thalys sans être complètement plein , top

2 heures pour rallier Médine à 300 kms à travers le désert , plat ou montagneux.

On me prévient dans le train que , la ville , et pas seulement les lieux saints , est interdite aux non musulmans.

Je rencontre la police à la gare de Médine : chaleureux , pas de problème pour entrer en ville ; je demande un document , inutile.

Shkran.

Pour la mosquée , suspense.

Ville immense également , 1.2 millions d’habitants , mais moins ramassée et plus plate que La Mecque.

Le prophète naquit à La Mecque , il mourut à Médine qu’il rejoignit au terme des l’hégire.

Mon hôtel , au 11 ème étage , domine la mosquée du Prophète , al Masjid al Nabawi , première édification au 7 ème siècle.

Imaginez un carré d’ environ un km de côté , au centre la mosquée elle même , également carrée d’environ 750 mètres , surmonté de 10 immenses minarets.

Les bords et accès sont protégés du soleil par des parasols géants , par centaines , qui sont refermés automatiquement à la tombée de la nuit.

Les abords sont aérés par d’énormes ventilateurs qui projettent de la vapeur d’eau , bienvenue.

Plusieurs entrées sur chaque côté de la mosquée , en passant devant , même à plusieurs dizaines de mètres , on sent le souffle de l’air conditionné .

Partout , climatisation , carburant , vitesse , on comprend que l’énergie n’est pas une question ici , prix et disponibilité.

L’intérieur de la mosquée est constitué de centaines de colonnes de marbre blanc , délimitant de grands espaces et de non moins nombreuses et grandes allées.

Les fidèles , femmes et hommes séparés , conversent , lisent , écoutent un prêche , prient 5 fois par jour.

Propreté impeccable , léger bruit de fond , tapis à l’infini , tout prête à la sérénité.

Pas pour moi.

Je ne veux rien demander de crainte d’un refus d’accès.

Lunettes de soleil , masque covid , main sur le cœur , sac à dos , j’entre dans l’immense enceinte.

Facilement reconnaissable , comme à La Mecque , je suis le seul blanc et objectivement non musulman au milieu de dizaines de milliers de fidèles , jusqu'à un demi million à l'époque du ramadan.

Qqes personnes en uniforme , gardes et entretien.

Rien.

Pas une interpellation , une question , un contrôle.

Il me faudra plusieurs heures pour être totalement serein et convaincu que je peux déambuler sans regard particulier , ni aucune demande.

À l’heure de la prière , je m’assieds un peu à l’écart , et suis la cérémonie qui se déroule , identique dans plusieurs espaces différents de la mosquée , milliers de personnes à chaque endroit , à chaque fois.

Après La Mecque , sans accès à l’intérieur de la mosquée et Mashad au nord est de l’Iran où j’ai pu passer tant d’heures y compris une partie de la nuit , Médine est le troisième lieu saint , si vaste à chaque fois , où je prends , à grande échelle , la mesure de la puissance , du raffinement , du sens de l’accueil de l’islam et de la civilisation arabe.

Je reste des heures à déambuler , contempler , lire , me poser.

Personne ne me demande rien.

Je photographie , discrètement.

Le lendemain , je continue de remonter vers le nord ouest , Al Ula à 250 kms , 3 heures de taxi collectif.

Stéphane , qui travaille au moyen orient , m’a convaincu de m’y rendre.

Al Ula c’est environ 5 000 habitants , cité au milieu du désert , entourée de montagnes et rochers spectaculaires.

Sur la route du commerce remontant d’Afrique via la Mer Rouge ou de l’ensemble de la péninsule arabique , Al Ula fut un point de passage pour les caravanes se dirigeant vers le nord , Mésopotamie , empire ottoman , Méditerranée , orientale puis occidentale.

Pendant 9 siècles , les dedanites dominèrent la région qui doit sa prospérité à l’eau présente si abondamment dans le sous sol qu’elle permit et permet la culture des palmiers dattier , des oranges et des citrons.

En plein centre , et jusqu’aux lointains environs , d’immenses oasis , vert profond , au fond des vallées , miracle à souvent plus de 40 degrés.

Autant dire qu’en cette fin mai , la saison touristique , chaleur élevée , est au ralenti.

Mais les visites sont maintenues , remarquablement organisées.

Un bus confortable nous emmène vers les différents sites , qqes dizaines de kilomètres maximum aux environs.

3 sites le matin , 2 l’ après midi.

On évolue sur le sable entre d’immenses rochers , massifs montagneux , et l’on découvre , au détour de l’un d’eux , une immense façade ocre sculptée , tombes royales à l’intérieur.

Dimensions uniques pour ces monuments figés dans le temps , dans le désert et le vent chaud , témoignages de la capacité incroyable de ces peuples , si dépourvus de moyens techniques , à témoigner pour l’éternité de leur génie et de leur conscience artistique.

Bien entendu , la ressemblance avec Petra en Jordanie 🇰🇼 , à moins d’un millier de kms , est très proche , 2 civilisations nabatéennes y ont vécu et oeuvré.

Je dîne au " nowhere " , chaudement recommandé par l’hôtel.

Autour d’une source active canalisée dans un bassin de mosaïques bleues turquoise , des espaces sont disposés , extérieurs ou ventilés à l’intérieur.

Luminaires , sièges , coussins , tables , couverts , tout est dans l’esprit des lieux qui accueillent depuis qqes années ce nouveau concept.

A la limite débute l’oasis , sensation de relative douceur.

Menu limité à une cuisine locale mêlée de Liban ; normal , Mohamad y a ses racines même s’il n’y vit plus

Homos de rêve , salades harmonieuses , glace à la rose , barbe à papa aux pistaches et summum , un Umm Ali , dessert traditionnel arabe : morceaux de pâte feuilletée , lait épaissi et crème , pistaches , épices , le tout servi chaud : un régal.

Mohamad n’est pas seulement le chef , il est l’inventeur du concept , bientôt décliné à Riyad et Dubaï.

Il travaille pour 2 femmes d’affaire , saoudienne et émiratie , à la tête , dans les 2 pays , d’une quarantaine de restaurants.

Concepts différents , burgers , slow food , et maintenant nowhere.

Elles sont venues le chercher , lui alors conseil en concepts culinaires.

L’état saoudien a financé l’intégralité des travaux et aménagements.

Les princes et princesses qui descendent de Riyad et Djeddah plébiscitent l’endroit.

Bravo , tip top

J’y retourne le soir suivant.

En rentrant je passe chez le coiffeur en bas de l’hôtel.

Il est minuit , mais ici on vit tard , mieux à 35 degrés qu’à 45.

Parti pour une coupe légère , je demande à être rasé.

Il s’exécute puis m’enduit , à la suite , après rinçages successifs , de 6 produits différents , soins du visage.

Je renonce et les arrête avant le 7 ème ; on aurait pu rester plus longtemps dans la nuit chaude.

Ils me délestent allègrement , pas envie de discuter , il est tard , ils sont souriants , satisfaits de leur bonne affaire , et le résultat me va , peau jamais aussi douce.

Pas envie de négocier ni discuter à cette heure et , de temps en temps , il faut se laisser aller à une action de générosité.

Le lendemain , bus pour Tabuk puis Haql , frontière jordanienne le long du golfe d’Aqaba.

East Africa / 8

Al Ula - Haql en 2 bus successifs via Tabūk.
l'Arabie Saoudite est décidément bien organisée , ATM , internet , transports collectifs , téléphone... tout fonctionne bien , argent du pétrole aidant.
Après Tabuk , la route depuis Bir'Ibn Hirmās longe d'abord un immense plateau avant de redescendre sur Haql et le Golfe d'Aqaba.
Je retrouve les concressions et les spectaculaires massifs d'Al Hula à une échelle bien supérieure mais sans les temples Nabatéens toutefois.
Mélange de sables qui du beige vont vers l'ocre , et de roches , toutes les déclinaisons de gris jusqu'au très sombre.
Il y a qqchose ici des Tassili du Hoggar , sud algérien , régions et environs de Tamanrasset et Djanet.
Mon ami Bob m'a promis d' y organiser une expédition à pied , retrouver ces zônes découvertes il y a plus de 20 ans avec Adrien , âgé alors d' une dizaine d'années et la mascotte des touaregs
Mais ça semble désormais très cher voire compliqué.

Haql , ville moyenne en taille et intérêt. Je trouve finalement un hôtel , un peu à l'extérieur , en bord de mer , on pourrait presque se croire au Liban , petite plage dédiée , cafetaria , chambre avec vue sur la mer.
Tout le reste , en ville , était froid , anonyme , mal placé.
Au magasin de plongée qui jouxte l'hôtel , on m'explique que toute activité avec bouteille est interdite , au moins dans le Golfe.
Je renonce à comprendre et de toutes façons ne suis pas concerné , j'ai renoncé aux bouteilles , plutôt judicieux en terre d'Islam.
Sur la plage, deux familles en vacances préparent un barbecue , fumet irrésistible.
Ils m'invitent à me joindre.
Ce sont 2 docteurs , amis égyptiens , qui exercent pour plusieurs années en Arabie , à l'hôpital de Tabūk.
Les conditions financières sont ici bien meilleures , les conditions de vie acceptables sans être toutefois enthousiasmantes.
Une fois 5/6 ans accomplis ils rentreront au Caire pour exercer dans leur pays ; une des épouses est également médecin , spécialiste des enfants âgés de 0 à 30 jours , je ne connaissais pas cette discipline.
On se régale avec les brochettes maison.
Abaya mais pas de niqab pour les épouses , une chacun .

Après 2 jours , fin du séjour de 10 jours en Arabie et direction la Jordanie 🇰🇼 au fond du golfe d'Aqaba.
Le Golfe , mesure 160 kms en longueur , largeur maximum de 24 kms , 1 850 mètres au plus profond ; on distingue toujours l'autre rive et la côte montagneuse.
Il a la particularité d'être baigné par 4 pays :

  Toute la côte est , l'Arabie saoudite

  Toute la côte ouest , l'Égypte
  Au nord , la Jordanie 🇰🇼 , Aqaba , et Israël 🇮🇱 , Eilat , se partagent un littoral d'une dizaine de kms , coincé entre leurs 2 encombrants voisins.
Eilat , déjà mentionnée dans la bible , port vital pour Israël dans son commerce avec l'Asie et l'Afrique , notamment lors du blocage du Canal de Suez en 1949 par l'Egypte , de nouveau en 1967 , entrainant la guerre des 6 jours.
Elle est jumelée avec Antibes , Toronto , UshuaÏa , Yalta , Los Angeles , Durban et Acapulco.

La traversée de la frontière vers Aqaba se fait étonnamment bien , sans visa.
Je redoute toujours ces passages , où on finit si souvent par vous expliquer qu'il manque tel document , tel certificat de vaccination et où on finit toujours par passer.
Je n'ai été refoulé qu'une fois : à l'aéroport de Bakou , Azerbaïdjan.
Ils n'ont absolument pas apprécié mon passeport tamponné Nagorny Haut Karabakh datant d'un précédent voyage en Arménie.
Comme une provocation voire une insulte à leurs yeux.
Renvoyé à mes frais vers Istanbul.

Aqaba a tellement changé depuis mon dernier passage , venant d'Amman et Petra , il y a 30 ans.
Le site demeure somptueux au fond du golfe mais il a été considérablement développé sous la houlette du roi Habdalah , au pouvoir depuis 1999. Lui , la belle Rania et sa famille , au sens large , s'y rendent fréquemment , le palais royal est royalement situé en bord de mer entre 2 grands hôtels , délice hachémite , j'imagine.
Les hélicoptères le confirment ce samedi.
Tous les Jordaniens rencontrés ont un grand respect pour les souverains.

Aqaba donc n'est plus la même.
Fini mon petit hôtel en bord de mer , place à 2 immenses resorts , luxe et volupté qqe chose de Dubaï en plus subtil.
Les capitaux seraient d'ailleurs émiratis.
Je choisis le Ayla Resort pour une découverte des petites ruelles , du port nouvellement aménagé et au final une pizza bienvenue et réussie.
L'essentiel des logements , boutiques , enseignes essentiellement occidentales , sont rehaussés d'un bleu Majorelle.
Très réussi avec qqes ferronneries de type arabe.
Je suis arrivé le matin et repars le soir en bateau vers l'Égypte.
Donc je squatte au Kempinski l'essentiel de la journée moyennant une histoire abracadabrantesque à laquelle j'ai , moi même , du mal à croire.
Ça passe , grande gentillesse de la réception et accueil adorable.
Donc piscine à débordement XXL , hall immense climatisé avec canapés , WiFi parfaite.
What else ?
Les 3/4 des clients , comme partout dans Aqaba , viennent d'Israël , via Eilat.
Passage de frontière sans problème.
Beaucoup de taxis jordaniens se débrouillent en hébreu.
Les prix sont ici au tiers d'Eilat ou Tel Aviv.
Qqes belles rencontres , nombreux à travailler dans la tech.

Le soir traversée d'une heure en bateau vers l'Égypte puis taxi de nuit , 2 heures pour Dahab.
Dahab est une halte idéale , côte nord du Golfe d'Aqaba
Suffisamment touristique pour proposer tout ce qui fait envie après 2 mois de voyage , commerces , hôtels , restaurants , cafés.
Mais un tourisme exclusivement individuel , contrairement aux bus bondés de Sharm el Sheikh , 100 kms plus au sud.

Un millier de Russes et Ukrainiens y vivent à l'année.
C'est un spot réputé de plongée , apnéistes à plus de 60 mètres.
 Ils m'expliquent la méditation préalable , la concentration , le début d'ivresse des profondeurs , les douleurs aux oreilles , l'addiction et la soif permanente de battre son record personnel
Les coraux sont plus beaux et surtout de toutes les couleurs comparé à Port Sudan.
Mais la faune est nettement moins nombreuse , c'était idyllique au Soudan.
Il faut découvrir  la côte sud , continentale , de l'Égypte , rive occidentale de la Mer Rouge , de Safaga à Ras Banas.
J'y serai bientôt.
Manquent à cette visite égyptienne au delà de ces sites réputés de plongée , Le Caire approfondi , Alexandrie , l'oasis de Siwa à la frontière libyenne et bien sûr le Nil et les pyramides , d'Abu Simbel au Caire.
Beaucoup de jeunes égyptiens , Égyptiennes , s'installent plus ou moins longuement ici à Dahab , travaillant en ligne , digital and co , loin de la folie Cairote.
Pas seulement , également des américains , européens , tiennent également une activité de plongée , ou un café , écrivent , se remettent ici d'activités stressantes et chronophages pour réfléchir à leur futur ; 2 HEC , ex Deloitte , par exemple
Idéal vraiment
Rien n'est cher
La ville à taille humaine
L'accueil excellent
Le temps et la mer chauds , éviter juillet août toutefois , comme dans toute l'immense sous région , au premier rang de laquelle la péninsule arabique , et ses 50 degrés , voire plus , les mois d'été.
Nombreux , nombreuses sont venus pour qqes jours ou semaines et sont restés des mois ou des années.
Voire se sont installés.

Escapade rapide , à une centaine de kms , pour le monastère orthodoxe de Sainte Catherine , 6 ème siècle ,plus ancien encore en activité au monde , 20 prêtres grecs y vivent.
J'arrive et repars trop tôt , c'est fermé.
Engoncé dans une vallée pierreuse , 1 570 mètres , dimensions relativement modestes , patrimoine de l'UNESCO.
Je manquerai la collection d'icônes et la bibliothèque.
Très fort et prégnant , comme toutes ces communautés chrétiennes d'Orient , coptes en Egypte , maronites au Liban , chaldéens d'Irak , assyriens , arméniens , protestants , un habitant sur 5 au début du 20 ème siècle dans la région , 5% aujourd'hui.
Egypte , Liban , Syrie , Israël , Irak , Iran , Jordanie , Turquie , Inde.

Le soir , bus de nuit pour rejoindre Le Caire.

East Africa / 9

À moi

J'ai tellement lu , entendu , vu , sur Le Caire.

À l'avenant :
Cité tentaculaire
Congestionnée
Sale et polluée
Bruyante
En proie aux agitations et déstabilisations permanentes
Tombée aux mains des Frères Musulmans
Incontrôlable , démographie galopante

Tout et tellement tout.
Presque tout est faux , fake , wrong , falso , impostore
J'arrive le matin par l'Est , venant de Dahab via Suez.
Et donc , je m'attendais à des embouteillages monstres.
Rien ou presque jusqu'au centre à l'approche de la place Tahrir
Les autoroutes sont neuves , larges et dégagées , il est 9 heures.
Alors oui ils klaxonnent beaucoup , so what ?
Pour le reste , ce n'est ni moins sale , ni plus sale que Paris.
Les Egyptiens sont accueillants , bienveillants , curieux et attentifs.

Immédiatement , je me sens bien dans la capitale.
Je loge à l' Hôtel Cléopâtra , qui donne sur la fameuse place Tahrir , Cafetaria ' Poire ' au rez de chaussée : salades , gâteaux , boissons : tout est bon , assis à regarder les flux de voitures et piétons qui tournent sur la place.
Un peu de Maidan dans cette place historique , moins rectangulaire mais bordée d'immeubles.
Littéralement Place de la Libération
A l'ouest , l'hôtel Nile Hilton et le siège de la Ligue Arabe
Au sud , la Mosquée Omar Makram , où se déroulent les obsèques nationales et l'immeuble Mogamma , cadeau et style soviétique ,1950 , don de l'URSS du temps de sa splendeur communiste , résidence professionnelle de milliers de fonctionnaires
Au nord , le Musée Egyptien
Inspirés par la révolte tunisienne , en 2011 , des centaines de milliers de manifestants s'y rassemblent , 2 millions dans toute la ville , entrainant finalement le départ d'Osni Moubarak ; nombreuses violences de janvier à mars.

L'Egyptian Museum est à 2 pas , sur la place .
C'est un immense bâtiment de 2 étages , façade rosée.
Tous les espaces sont occupés , les objets et statues sont à l'air libre ou dans des vitrines , plus ou moins
grandes , cadres de bois , verre ancien.
Ce qui frappe d'emblée , c'est l'abondance , la richesse des collections , des milliers de statues , des dizaines de sarcophages , pierre ou bois et tous les petits objets artisanaux de la vie quotidienne.
Également la qualité de conservation , l'essentiel date de 3 à 4 000 ans.
Et puis , et surtout , la stupéfiante originalité et beauté de ces témoignages d'une civilisation subtile , créative , intrigante et mystérieuse , moderne dans son élégance , nous envoyant comme des signes par delà les siècles
Je déambule plusieurs heures , chaque objet , chaque salle surpasse le précédent ou la précédente.
Ces collections sont exposées dans un mélange d'organisation et de désordre contrôlé.
Je retiens l'hippopotame bleu , turquoise unique , dont je possède chez moi une copie , modèle réduit.
Les hiéroglyphes sur des panneaux de bois , une pensée pour Champollion , " Je suis tout à l'Egypte , elle est tout pour moi "
Les profils stylisés , animaux ou humains.
Les immenses statues de grès rose , Abu Simbel à portée de main.

Et bien sûr , salle spéciale , gardée et climatisée pour Toutânkhamon
Pharaon du 14 ème siècle avant notre ère , parents frère et soeur , sépulture découverte en 1922 par Howard Carter , il épousera sa propre soeur et mourra à 19 ans
Il sera enroulé dans des centaines de mètres de lin , 143 objets précieux y insérés
Conservation exceptionnelle , dominantes de bleu et d'or .
A l'intérieur du tombeau , jamais fouillé ni pillé , rareté exceptionnelle , son sarcophage et son masque d'or , et surtout intacts , des milliers d'objets : trône , lits , bijoux , statuettes , masques , témoignent de l'habileté des artisans et artistes , du faste de l' époque et de l'attachement à une somptueuse esthétique.

Photos interdites ...pourquoi ? , alors ...

C'est une visite très courte dans la capitale , alors je choisis un des nombreux quartiers à portée du centre où je réside
Gezira et Zamalek une des grandes iles sur le Nil , hôtels luxueux , restaurants et mélange de boutiques traditionnelles et plus modernes , également les ambassades , immenses et magnifiques immeubles le long du Nil , notamment la gigantesque nonciature du Vatican
Garden City , résidentiel et arboré
Darb Al Ahmar , traditionnel , souk et entrelac de petites ruelles
Quartier Copte , c'est là que je me rends , en métro , station Mar Girgis.

Les coptes en Egypte , 10 millions soit 10 % de la population , 1/2 million au Soudan.
Les coptes sont très majoritairement orthodoxes , minoritairement catholiques et protestants.
Les coptes se rattachent à l'Eglise chrétienne d'Alexandrie , une des plus anciennes au monde
Les coptes se considèrent comme d'authentiques égyptiens anciens , descendant de l'époque des Pharaons.
L'Ethiopie fut évangélisée par l'Egypte dès le 4 ème siècle , la population orthodoxe y représente la moitié des éthiopiens.
Ils sont quasiment tous végétariens , endogames , leur langue , le copte , n'est plus que liturgique ; Boutros Boutros-Ghali était copte , tout comme Xavier Dolan , par son père.
Là tout est calme et apaisé en regard de l'agitation cairote.
Musée et église suspendue côtoient la mosquée Amr Ibn al As , 642 , première mosquée d'Égypte et la synagogue Ben Ezra , 9 ème siècle , bâtie sur les fondations d'une église chrétienne.
À qqes pas de distance , les 3 religions du livre se côtoient , en harmonie , du moins autant que je puisse le ressentir.

La veille j'ai dîné chez Abou El Sid , traditionnel égyptien , authentique , beaucoup de clients locaux , plutôt haut de gamme , lumière tamisée , décoration on se croirait dans un film de Mohamed Khan
Au menu tagine veau et artichaut , vin blanc d'Égypte , enfin après bientôt 2 mois de sevrage vin blanc frais du pays , tout à fait acceptable
Et mon dessert arabe favori depuis Al Ula , un Um Aly , chacun sa version , le saoudien tient toujours la corde.
Un moment délicieux , le charme Égypto Cairote est à l'œuvre.
Je termine la soirée sur un des nombreux roof top qui dominent le Nil , flanqué de grandes tours illuminées , magique.
Chicha , mais nature , je renonce à l'autre option

Bien sûr , Le Caire me ramène au roman de Alaa al-Aswany , " l'immeuble Yacoubian " , 2002 où il exerça comme dentiste
Beaucoup aimé cette plongée dans ce microcosme social , quartier central du Caire , l'immeuble art déco 1937 toujours en place de la rue Tallat Harb comme un personnage , abritant ses propres personnages :

Zaki Dessouki

Taha el Chazli

Boussaïana Sayed

Malak Kalo

Hatem Rachid

Soad Gaber

...

Film de Marwan Hamed

Pierre connaît bien ,

Canadien de Montréal , journaliste pour Radio Canada jusqu'il y a 3 ans.

Installé depuis 20 ans au Caire , il tient , au 1 er étage d'un immeuble plutôt cossu , une galerie d'Ali Baba , verres polis , designer local , antiquités et brocantes , meubles refaits à partir d'anciens modèles , luminaires , carrelages syriens , objets iraniens...
Atmosphère très réussie.
J'aime beaucoup et on s'entend bien.
Il me donne qqes conseils de son expérience ici , voyages et bonnes adresses , également la température politique.
Moubarak , bien au début , a trop duré
Morsi , aux mains des frères musulmans
Sissi , pas empereur , est plutôt apprécié , il a entrepris beaucoup de travaux d'infrastructure et cela se voit. Il gére l'immense paquebot égyptien , démographie en folie , 103 millions d'habitants.
Tous ceux rencontrés sont plutôt positifs à son égard et ce que j'ai vu confirme.
Pierre vend l'été aux habitants fortunés du golfe qui fuient ici les grandes chaleurs et trouvent également ce qui est interdit chez eux .
Parmi ses clients , des créateurs français , célèbres ou pas , dont les créations de l'un , villa à Louxor , se repèrent à la couleur de la semelle.

Court , décidément trop court.
Mais si dense et passionnant que je reviendrai en septembre.
Au programme , à ce jour , flexibilité de régle ,

Le Caire encore et toujours

Alexandrie

Oasis de Siwa , frontière libyenne

Lac Nasser et Abu Simbel

Plongées en Mer Rouge , côte continentale entre Safaga et Ras Banas , nord de la frontière soudanaise.

Retour à Paris dans la nuit.

Fin de ce voyage.